De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Les urgences viscérales, orthopédiques et neurochirurgicales subissent une petite toilette sans grande extension. Ainsi, les trois spécialités sont momentanément transférées au rez-de-chaussée du pavillon. Cependant, le rush reste incessant vers cet hôpital qui tourne à plein régime pour prendre en charge les populations de l'Est… De jour comme de nuit, le pavillon des urgences du CHU Benbadis est sollicité par la population. Il ne répond pas seulement à la demande locale en matière de soins et de prise en charge, mais accueille des citoyens des autres wilayas, lesquels transitent par cet hôpital. C'est la notoriété du CHU, disent les uns, qui fait que cet organisme public de la capitale de l'Est est prisé par des malades. Un bonus qui s'explique, car, de l'avis de quelques spécialistes, les établissements de santé publics (EPSP) ne prennent pas en charge des cas plus ou moins «graves». Une adéquation qui donne du tournis au CHU, dépassé. «On habite à Aïn Kerma (Messaoud Boudjeriou), une commune de Constantine. Mais on ne dispose pas de médecin qui traite des cas sérieux. Franchement, on se rend à la polyclinique rien que pour un simple rhume», se plaint un habitant de cette municipalité qui a conduit les parents d'une fille blessée au niveau de la neurochirurgie. Sur place, l'adolescente de 13 ans passera une radio avant d'être admise pour une exploration approfondie. «Heureusement que le scanner fonctionne depuis près de 4 mois. Sans quoi, on serait impuissant pour le diagnostic», confie le neurochirurgien tout en rassurant la mère. En plus, cette radiologie est effectuée à un prix symbolique (100DA). Le CHU de Constantine est passé par une phase critique ayant trait au dysfonctionnement de cette radiologie. Et ce n'est qu'après moult sollicitations des professeurs et une prise de conscience de quelques responsables que l'administration aura réagi pour réparer le scanner et songer à l'installation d'un autre en attendant la mise en service de l'imagerie par résonance magnétique (IRM). «A vrai dire, le problème ne se pose pas pour le moment, car, parfois, on se retrouve devant un obstacle infranchissable, notamment durant la nuit. Des malades devraient impérativement être diagnostiqués par un scanner. Il fallait solliciter de cliniques privées pour le faire à une heure tardive, et ce n'est pas toujours facile…», révèlent les médecins de garde. En matière d'équipement pour exercer, les blouses blanches urgentistes estiment disposer de moyens du bord élémentaires. «On pratique avec le strict minimum», lancent-ils. Et d'ajouter : «Si l'on compare entre ce que les cours de la neurochirurgie imposent comme outils de travail et les moyens dont on dispose aux urgences il faut avouer que le fossé est grand. On œuvre avec le strict minimum pour sauver des vies humaines.» La neurochirurgie traite en moyenne 60 patients toutes les 24 heures avec 5 admissions et 2 à 3 opérés. Accidents routiers et du travail, traumatisme, chutes… ce sont les maux que ce pavillon traite au quotidien. En plus du rush incessant, les médecins déplorent «l'absence de sécurité et le non-respect de la corporation par quelques citoyens qui se présentent pour se faire soigner». Sur un autre plan, ils déplorent «l'inexistence de cette spécialité avec un seul neurochirurgien. Il nous transmet des cas délicats. Il prend en charge les autres. Au niveau de la majorité des hôpitaux, cette spécialité n'a pas encore vu le jour.» Le même constat de prise en charge est perceptible du côté des urgences orthopédiques. «Pour une simple fracture, on ordonne des évacuations vers le CHU de Constantine», se lamente un médecin. Ce sont des blessés qui viennent souvent des autres wilayas limitrophes. De plus, «la sécurité des médecins n'est pas vraiment assurée au niveau de ce pavillon et tout le monde peut entrer et sortir à sa guise». «On assiste souvent à des rixes qui laissent la corporation perplexe», avoue une praticienne avant de poursuivre : «Heureusement que la radiologie traditionnelle est opérationnelle.» Les urgentistes estiment qu'il est grand temps d'apporter un système médical performant dans les CHU quitte à le calquer sur d'autres modèles performants. Un changement qui interviendrait également avec l'implication du citoyen qui doit mettre la main à la poche pour payer ses consultations à un prix dérisoire. «Parmi les centaines de malades qui défilent à l'hôpital, il est rare de certifier que tous les auscultés s'acquittent des 100 DA.» Les urgences médicales : entre malades imaginaires et malades réels… Changements de pavillon. Changement de catégorie des patients : les urgences médicales. Celles-ci sont convoitées par des personnes diverses, dont les malades imaginaires, voire les noctambules en état de stress. Là, au moins, on peut apercevoir un staff médical porter des bavettes pour «éviter» une contamination hasardeuse du virus A (H1N1) contrairement aux unités visitées auparavant où l'on ne décelait aucune présence de masque de protection. Les bavettes, selon un médecin, sont distribuées à la demande du staff médical. Mais il faut s'imposer pour en bénéficier. Un infirmier du même service confirme la distribution des masques uniquement dans les services d'infectieux et de réanimation. Soit les deux espaces beaucoup plus exposés. Pour rester dans le contexte de la grippe porcine, notre interlocutrice de garde affirme que des patients qui ont une poussée de fièvre se présentent quotidiennement aux urgences médicales. «En fait, depuis l'alarme de la pandémie, la moindre poussée de fièvre est prise au sérieux par les malades qui se présentent. On les oriente vers des centres dégagés à cet effet en cas de suspicion de symptômes.» Sur un autre chapitre, le médecin évoque l'incompréhension de l'urgence vitale chez quelques citoyens. «Les urgences médicales sont souvent confondues avec une simple structure de consultation. Cet état complique la tâche des urgentistes. Au lieu de se présenter dans un établissement de santé de proximité, le malade juge utile de se ruer vers le CHU. On assiste parfois à une anarchie.» C'est par-dessus tout «le manque d'organisation et de valorisation qui prime dans ces urgences médicales censées traiter les sujets présentant des pics de tension ou de diabète, des œdèmes et autres pathologies», dira la praticienne. Et de renchérir : «Si l'on avait seulement affaire à des cas urgents, on maîtriserait sans contrainte le sujet.» En matière de médication, on apprend qu'il y a, parfois, rupture de stock. Il faudrait trouver une issue pour ne pas laisser la santé du malade se dégrader. Cela appelle un soin méticuleux : «Lorsqu'on enregistre un manque en médicament, le recours à l'extérieur, c'est-à-dire aux officines privées, demeure la seule alternative pour des patients ne présentant pas une urgence vitale, afin de prendre en charge les cas jugés cliniquement sérieux.» En somme, le centre hospitalier universitaire de Constantine cumule autant de pression à laquelle vient s'ajouter une mauvaise organisation que l'administration devrait réguler pour ne pas aggraver les cas des malades.