Il se déroule, depuis quelques jours, un scénario pour le moins étrange autour de la sélection nationale de football. Faisant suite à l'unanimisme de façade dans lequel -à mesure que Saadane et son groupe alignaient performances et exploits dignes d'inspirer la chanson de geste- se sont inscrits des personnages. Ces derniers ont toutefois vite retrouvé leur naturel pour s'en prendre d'une manière sordide au sélectionneur national. Il est vrai que lesdites sorties médiatiques des uns et des autres ont la particularité de ne pas être frontales mais n'en sont que plus sournoises en raison de leur subtilité, d'autant que les critiques les plus acerbes d'aujourd'hui ont hier été les plus grands tartuffes du coach. Ils sont allés allégrement et avec une tartufferie incomparable à la soupe dans une attitude qui n'a eu alors d'égale que leur propension actuelle à aller à cloche merle. Bien entendu, le détonateur aura été le renouvellement des effectifs. Un turn-over somme toute logique compte tenu d'abord de la nature de challenges nouveaux et surtout spécifiques auxquels ne peuvent pas forcément répondre les mêmes éléments même s'ils ont été les artisans d'une campagne héroïque à plus d'un titre. Les services rendus à la nation ne peuvent leur être déniés et le peuple algérien leur restera éternellement redevable pour les moments d'émotion et de fierté nationale qu'ils lui ont fait retrouver, mais il est des investissements qui ont besoin, une fois identifiés, d'être intelligemment gérés. Cela les membres du staff national, toutes responsabilités confondues mais aussi jusqu'aux hautes institutions, l'ont compris. Preuve en a été régulièrement fournie par la disponibilité de tout l'Etat autour de l'EN. La raison ? Capitaliser au maximum cette phénoménale dynamique tout en s'évitant attitudes et réaction dilettantes, qui ont tellement desservi par le passé la sélection nationale, et se départir également de sensibilité quand il n'en faut point parce qu'il s'agit de l'intérêt national. La progression inexorable de l'EN devrait s'arrêter un jour ou l'autre. C'est une question de réalisme, et ce jour-là pourrait être en janvier prochain-même si la CAN, sans pour autant qu'elle soit négligée, est ravalée au stade d'étape, une sorte d'antichambre de préparation du Mondial. L'idée maîtresse demeure cependant que tout peut être possible aussi bien dans l'une que dans l'autre compétition et que la sélection nationale s'y rende avec de bons arguments. A juste titre, ces bons arguments, et il n'y a que le coach qui peut les discerner et les maîtriser, d'autant plus qu'il y a quarante-huit heures il affirmait «…être seul comptable des succès et/ou des échecs de l'EN». Tout Algériens ne peut qu'être convaincu de la volonté et forcément des capacités de Rabah Saadane à faire du mieux avec son groupe et surtout d'en assumer les conséquences. Le côté sombre, parce qu'il en existe un, c'est malheureusement l'option choisie par le sélectionneur national de répondre tous azimuts et dans la plus grande improvisation à ses détracteurs. Autrement dit, dans un contrasté déphasage par rapport au rendez-vous imminent de janvier prochain. Et même si dans un tel cas de figure, Rabah Saadane, pour des raisons d'honneur personnel ne devrait pas effectivement se laisser marcher sur les pieds - et pour cause les résultats qu'il peut opposer à ses détracteurs - aurait été plus avisé de laisser…courir. Il y a une dizaine d'années, un précédent inoubliable avait accompagné le mondial des Français. A l'unanimité - dans majorité - la presse française avait fait feu de tout bois dès lors qu'il s'agissait de descendre en flammes Aimé Jacquet. Le tort de celui-ci était de ne pas répondre aux canons du poste arbitrairement établi par cette même presse et qu'il entrait encore moins dans la grille de lecture de journalistes et responsables de médias confortablement assis dans leur fauteuil ou dans les tribunes d'honneur du stade. Nul ne peut ignorer alors le parcours des Bleus et la fin en apothéose de l'aventure de celui qui était alors qualifié de «plouc» par des journalistes intéressés, certains de ses collègues déstabilisés par ses choix tactiques non conventionnels mais aussi de milieux bien pensants, heureusement très vite confondus et ridiculisés par l'avenir. Plus trivialement, d'autres diront : «Les chiens aboient…la caravane passe». Saadane devrait se suffire de ce proverbe en ce sens qu'il ont déjà fait l'essentiel, lui et ses hommes, et tous ceux qui les ont accompagnés tout au long de la campagne de qualification, et qu'ils ne peuvent qu'avoir droit à la considération générale du peuple algérien. Demain sera un autre jour... A. L.