La révolte contre l'injustice dans le monde est aussi vieille que la conscience humaine. Aussi, il était normal de voir cette Algérie de 2009 vibrer, presque au quotidien, au rythme des émeutes qui secouaient les quatre coins du pays et du deuil des familles qui voyaient leurs enfants se jeter à la mer dans des barques d'infortune, au péril de leurs vies, plutôt que de supporter ces jours qui s'égrènent sans le moindre espoir en des lendemains meilleurs. Pourtant, le pays est riche naturellement et assez vaste pour que tous ses enfants puissent y vivre prospérité. Les 35 millions d'Algériens aiment leur pays. Ils n'ont pas besoin d'en fournir des preuves supplémentaires. Ils ont toujours été là à chaque fois que ce pays avait besoin de nouveaux sacrifices. Pourtant, pour y vivre il faut bien avoir un logement décent, un travail stable, un salaire correct. Des problèmes que vivent les Algériens, sauf une caste de privilégiés qui continue de pourrir leurs vies depuis des décennies. L'injustice ne s'arrête pas à ces crises qui ont marqué et continuent de marquer les Algériens depuis l'indépendance. L'injustice touche jusqu'à leurs repères historiques et identitaires. La confiscation de ces derniers et l'omerta sur certains épisodes de son histoire ne font qu'augmenter le sentiment de malaise. Un sentiment accentué par la mise à l'écart et l'isolement des élites intellectuelles, notamment les brillants chercheurs et les universitaires contraints à l'exil en quête de cieux plus cléments. La marginalisation de compétences reconnues au profit des cercles qui gravitent autour du pouvoir allonge chaque jour les rangs des «déserteurs» du pays. A cela se greffe le dénigrement des choix du peuple et le sentiment de trahison des serments et idéaux des martyrs de la révolution, la corruption, les crimes impunis, le favoritisme… Bref, autant d'injustices qui renforcent le sentiment d'une liberté confisquée ou prise en otage par certains privilégiés. Certes, les Algériens ne sont pas seuls à souffrir des ces injustices. C'est vraisemblablement le lot de la majorité des habitants des pays sous-développés. Mais les Algériens, qui connaissent si bien l'importance des revenus de la manne pétrolière, aspirent légitimement à une amélioration de leur quotidien. Si l'Algérie connaît aujourd'hui de nombreuses difficultés, elle a besoin d'une réelle volonté politique pour trouver les solutions aux maux qui gangrènent la société et qui accentuent son malaise. Plus que jamais, les gouvernants doivent se départir des politiques illusionnistes et de cette fuite en avant qui ont longtemps caractérisé le mode de gouvernance. Les politiques algériens ont de tout temps adopté le credo de l'ancien président du Conseil français de la IVe République Henri Queuille. Lequel affirmait, à chaque fois, que la politique ne consiste pas à faire taire les problèmes, mais plutôt à faire taire ceux qui les posent. La stabilité politique, sociale et économique ne passe certainement pas par le musèlement de toutes les voix discordantes, car la sagesse du grand philosophe grec Platon nous rappelle que le plus grand mal, à part l'injustice, serait que l'auteur de cette injustice ne paie pas la peine de sa faute. G. H.