De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani Au-delà des manifestations de joie qui ont empli le tout-Annaba dans la soirée de lundi dernier et la matinée d'hier, particulièrement dans les quartiers populaires, c'est l'espoir qui est rendu et désormais plus que permis aux Algériens qui ont rêvé de cette équipe et l'ont portée à bras-le-corps. En effet, dans la soirée déjà, c'est une liesse populaire qui s'est exprimée, une liesse qu'on n'a pas vue depuis des décennies et qui a apporté du baume au cœur des milliers de supporters inconditionnels des Verts. «Maintenant, tout est permis, cette équipe est la bonne, elle a trébuché puis s'est redressée et elle continue sa marche inexorable vers la Coupe d'Afrique. Nous serons finalistes, n'en déplaise à certains qui l'avaient tenue il n'y a pas si longtemps pour finie», déclare un jeune. L'avenue Ibn Khaldoun (ex-Gambetta) regorge de revendeurs d'articles divers aux couleurs nationales. Echarpes, drapeaux, maillots de corps avec les noms des joueurs, parapluies et autres objets sont étalés parfois à même le sol ; des dizaines de clients accompagnés de leurs enfants se bousculent pour en acheter ; tout le monde veut avoir son «amulette», une sorte de porte-bonheur pour l'équipe nationale. Certains, superstitieux, croient dur comme fer que si les Verts jouent en blanc, ils gagneront certainement. «A chaque fois que l'équipe nationale endosse la tenue blanche, on gagne, on peut faire match nul mais on ne perd jamais. Si Saadane les fait jouer en blanc pour le prochain match, c'est sûr qu'on se qualifiera pour les demi-finales et là ce sera la grande fête», nous confie un habitant de la périphérie. Sur le cours de la Révolution, cœur battant de la ville de Annaba, les visages éclairés par de larges sourires et par une joie qui s'étale au grand jour augurent une bonne journée pour tous, même pour les revendeurs à la sauvette devant leurs petits étals de cigarettes ou de cacahuètes. Le drapeau national est de rigueur, accroché sous le petit carton avec au-dessus le portrait de l'équipe nationale. Les jeunes n'ont à aucun moment laissé tomber l'équipe nationale ; ils la soutiennent envers et contre tous. Ici, on ne jure que par Antar Yahia, Halliche ou Ziani, il n'y a plus de place pour les joueurs du Barça qui avaient fait rêver toute une génération et auxquels presque tous se sont identifiés. L'équipe nationale qui a volé de victoire en victoire a réconcilié l'Algérien avec son identité propre, lui a donné de nouveaux repères qui trouvent leur origine dans le passé récent avec l'odyssée de Gigon en Espagne et l'a même replongé dans son histoire antique pour redécouvrir Chichnak, le roi berbère, et sa victoire sur Pharaon. Il faut dire aussi qu'en matière d'amour de la patrie et de nationalisme désintéressé et spontané, la «dream team» a réussi là où tous les politiques ont failli. On se rappelle l'opération «un drapeau dans chaque foyer» lancée il y a quelque mois et qui n'a pas vraiment eu le résultat escompté ; il a fallu quelques matches remportés par les Verts pour que tous sans exception se bousculent pour acheter le drapeau national. On se retrouve dans chaque famille avec 3 à 4 drapeaux qu'on agite et dans lesquels on se drape à chaque occasion et là, il n'y a pas de calculs, pas d'injonctions, pas de visées politiques, c'est le peuple qui se réapproprie ses couleurs, cet emblème national si chèrement payé.