à force de s'inscrire dans la durée, les grèves des enseignants et des médecins traduisent plus qu'un malaise social. La gouvernance semble atteindre les abysses. Le malaise est donc parti pour durer davantage si l'on fie à la détermination de ces fonctionnaires désabusés par des conditions socioprofessionnelles intenables. La colère exprimée de nouveau hier par les enseignants et les médecins est manifestement l'expression d'une faillite dans la gestion de deux secteurs importants dans la vie d'un pays. Boubekeur Benbouzid et Saïd Barkat se sont parfaitement complémentés, certainement sans aucune concertation, pour illustrer que la gestion leur échappe. Le ministre de l'Education nationale n'a pas trouvé meilleure réponse que de préconiser la patience aux enseignants au bord de l'usure. La recommandation de Benbouzid est d'autant plus inconcevable car émanant d'un responsable qui règne sur le département de l'éducation depuis une quinzaine d'années. Le ministre de la Santé n'en fait pas par ailleurs mieux que son collègue en charge de l'éducation. Saïd Barkat ne s'est pas en effet gêné de déclarer aux médecins contestataires «son incapacité à gérer» tous les dossiers du secteur allant de la grève des praticiens à la vaccination «réadaptée» contre la grippe porcine. Un aveu d'impuissance que nul ne peut tolérer dans la mesure où la question relève de la santé publique. Vu à part, le secteur de l'éducation ne saurait concrétiser la réforme promise sans que l'acteur principal de ce «projet» de réforme, à savoir l'enseignant, ne trouve l'environnement favorable pour accomplir sa mission. Nous sommes hélas dans un système où l'acte d'enseigner perd chaque jour sa noblesse et ses valeurs. Il est manifestement vain d'attendre des résultats positifs d'une réforme éducative au moment où l'enseignant est livré à son sort. La situation précaire dans laquelle exercent nos enseignants ne date pas des dernières années scolaires, elle traîne depuis environ deux décennies. Ce qui rend caduques toutes les explications que fourniraient les responsables du secteur, décidément plus adaptés à des opérations de replâtrage qu'à élaborer une nouvelle orientation de l'école plus conforme à la réalité algérienne et inscrite dans le contexte universel. La réalité du secteur de la santé ne diffère pas de celle de l'éducation. Le cafouillage qui a entouré l'opération de vaccination contre la grippe porcine est venu achever un tableau noir d'un secteur qui bénéficie d'enveloppes financières très importantes pour des résultats très décevants. En plus du fait qu'elles rappellent la triste réalité sociale du pays, les grèves- tous secteurs confondus- révèlent le visage réel de la gouvernance des institutions. A. Y.