Les éditions Chihab ont organisé, samedi dernier au siège de leur librairie à Bab El Oued, une rencontre-débat avec Mahmoud Mostefaoui à l'occasion de la publication de son livre Afin que nul n'oublie, la bataille de Maison Carrée. Etaient présents à cette rencontre la plupart des anciens moudjahidine de la section d'El Harrach (Zone 1 de la Wilaya IV), citée dans le livre, ainsi que des représentants de la fondation Mémorial de la Wilaya IV.Idir Azibi, qui a recueilli et rédigé le témoignage de Mahmoud Mostefaoui, a entamé la rencontre avec la présentation du parcours de l'ancien moudjahid et annoncera que cinq textes puisés dans le livre vont être étudiés dans certains lycées et facultés d'Alger. Le débat est ensuite lancé. La plupart des moudjahidine présents soutiennent que leur combat était pour la patrie et non pour la gloire, ce qui explique leur silence. Ce à quoi l'ancien moudjahid Embarek Bouteldji, dit Si Rabeh, présent dans l'assistance, réplique : «Il faut que nous témoignions, nous nous sommes coupés des jeunes. N'oubliez pas que nous avons traversé une époque où on n'osait même pas dire que nous avions pris les armes pour la liberté. Cette jeunesse, qui n'a pas connu le colonialisme, ose dire que c'est de Gaulle qui nous a donné la liberté et que l'Algérie était mieux au temps de la France.» Suite à cette réplique, les témoignages pleuvent sur l'assistance. M. Mostefaoui entre dans le vif du débat en clamant : «Jamais de Gaulle n'a donné la liberté aux Algériens. La preuve, c'est qu'après son fameux discours l'armée coloniale française avait multiplié ses effectifs. C'est les armes et la politique qui ont donné la liberté aux Algériens. Si on avait poursuivi la guérilla urbaine à El Harrach et dans d'autres zones urbaines, c'est pour qu'il y ait un retentissement dans les médias français car malheureusement ceux qui étaient morts dans le maquis n'avaient pas droit à la une des journaux.»La torture et le devoir de repentance de la France étaient également au cœur de cette rencontre. Cet ancien fidaï, qui a toujours six balles logées dans le corps, dira qu'il a été torturé alors qu'il était blessé. Plongé dans le coma, il ne sait pas combien de jours il a subi des sévices avant d'être transféré à l'hôpital. Et aussi l'émouvant témoignage de Lakhdar Chaibi, dit El Rougi, condamné à mort à l'âge de 17 ans, ce qui l'a forcé à entrer dans la clandestinité. L'autre témoignage émouvant est celui de Ahmed Cherif, qui était surnommé «Trompe la mort» car il lui a échappé plusieurs fois et a même été déclaré mort à l'état civil. La rencontre s'est clôturée sur la nécessité d'initier des actions pour transmettre cette mémoire aux jeunes générations en impliquant notamment le système éducatif «afin que nul n'oublie le prix payé pour la liberté». S. A.