Photo : S. Zoheir Par A. Lemili Le Journal officiel algérien semble être encore le seul, sinon le dernier lien fiable dans une Algérie où, en matière de gestion et de conduite des affaires publiques, il n'existe plus l'ultime rempart à même de protéger un serviteur de l'Etat et, ce faisant, de préserver sa carrière. En plus clair, il paraît, au jour d'aujourd'hui, du domaine de la gageure de séparer le bon grain de l'ivraie avec cette profusion d'affaires de corruption dont les effets concentriques rythment l'actualité nationale et font le bonheur des médias.Commis de l'Etat et hauts cadres de la nation, parmi lesquels des parlementaires, figurent, comme d'autres s'afficheraient allègrement au who's who, dans les deux dernières éditions du Journal officiel. Ce qui, somme toute et en d'autres circonstances, serait d'une navrante banalité sachant que la démarche empruntée par les 26 agents de l'Etat consiste en la déclaration de patrimoine de tout agent de l'Etat prenant nouvelle fonction est, il ne peut plus être, réglementaire et obligatoire.C'est du moins ce qui ressort des termes de la loi 01-06 du 20 février 2006 et qui ne pourrait avant tout n'être que le respect dû à l'éthique au minimum. Il y a très certainement un peu de mérite dû à ces commis de l'Etat et parlementaires d'avoir permis au JO d'identifier leur fortune mais aussi d'en faire quelque part la publicité. Mais le Journal officiel n'est certainement pas le premier à être sur les étals de kiosques tous les matins. En tout état de cause, cette publicité sur les avoirs et biens personnels des agents de l'Etat les blanchit par anticipation puisque cette loi fait obligation aux agents concernés de refaire la même déclaration une fois qu'il est mis fin à leur fonction. C'est beau comme l'antique, dirait le citoyen lambda évidemment, si peu convaincu que toutes ces circonvolutions administratives puissent effectivement attester de la sincérité et la probité des cadres et parlementaires de l'Etat… scannés au JO. Il suffirait pour cela de se pencher un peu plus sérieusement sur la fortune de chacun des hommes et/ou femmes ayant gravité dans les limbes politiques, exécutifs, administratifs et/ou judiciaires pour avoir une idée précise. Quoi qu'il en soit, il y a nécessité de s'interroger sur le choix du moment et des considérations, les vraies, ayant conduit à une telle démarche, d'autant qu'elle n'obéit d'abord pas au timing qu'imposent les textes, ensuite parce que celle-ci vient, toutes proportions gardées, en rajouter à une actualité brûlante du fait d'un déballage inhabituel d'affaires de corruption duquel, loin s'en faut, ne sont pas épargnés, à tort ou à raison, de hauts responsables appartenant à ifférentes strates de l'appareil gouvernemental. Comme dans les plus sordides affaires de corruption ayant pour protagonistes les cols blancs, l'Algérie profonde n'est plus en mesure de discerner le fidèle et désintéressé serviteur de l'Etat de l'argousin.Toutefois, «les chemins de l'enfer sont pavés de bonnes intentions», dit un adage. La question qui pourrait se poser d'emblée à n'importe lequel de nos compatriotes serait de connaître «les raisons qui auraient poussé les agents de l'Etat évoqués dans les deux éditions officielles à ne la faire (déclaration) que maintenant, pour ne pas dire pourquoi avoir mis tant de temps pour que chacun jure la main sur le cœur qu'il ne possède que ce qui lui… appartient».Et là, à juste titre d'ailleurs, la loi stipule que «l'agent public souscrit la déclaration de patrimoine dans le mois qui suit sa date d'installation ou celle de l'exercice de son mandat électif. La déclaration de patrimoine est également établie en fin de mandat ou de cessation d'activité.» Pour les 26 personnes concernées, nous ne prendrons à titre d'exemple, rien que pour illustrer le retard mis pour la déclaration de patrimoine, les parlementaires. Il est de notoriété publique et pour cause que les dernières élections législatives seraient à même d'exiger une datation au carbone 14 pour en situer la date précise. En fait et nous n'insisterons jamais assez là-dessus, la déclaration de patrimoine est pour les fonctionnaires de quelque nature que cela soit, un acte réglementé et encadré par les lois de la République, il est donc du devoir, voire de l'obligation de chacun de ces fonctionnaires de faire état de sa fortune avant, pendant et après la fin de la mission qui lui a été dévolue. Ils le font sans doute, comme en est apportée la preuve ci-dessus. Bien entendu, la démarche est sujette à caution comme est sujet à caution le contrôle fait a posteriori par les organes ad hoc de l'Etat.Dans l'une de ses dispositions essentielles, la loi 01-06 stipule que «la déclaration de patrimoine, prévue à l'article 4 ci-dessus, porte sur l'inventaire des biens immobiliers et mobiliers situés en Algérie et/ou à l'étranger, dont il en est lui-même propriétaire, y compris dans l'indivision, ainsi que ceux appartenant à ses enfants mineurs.» Etrangement, il n'est pas fait mention de l'épouse… et pourtant. C'est encore une fois beau comme l'antique. Mais c'est tout ce qui pourra être retenu. Ladite loi a été promulguée pour faire face à la progression phénoménale de la corruption. Or, celle-ci semble s'être définitivement installée. Elle est même passée au stade de sport national. Quand dans une entreprise publique économique 18 agents (Complexe moteurs et tracteurs de Oued Hamimime) se retrouvent en prison pour gestion frauduleuse, il y a, bien entendu, des questions à se poser et se les poser très sérieusement quand le citoyen lambda aura à savoir que parmi ces 18 personnes se trouvent le DG, ses collaborateurs directs et indirects et une femme de… ménage. C'est dire qu'il y a forcément quelque chose de pourri dans le…