La capitale algérienne se transformera, l'espace de quelques heures, en un atelier de réflexion et de débat sur l'épineuse problématique de la lutte antiterroriste et sécuritaire dans la région du Sahel. Après plusieurs reports, la rencontre qui s'ouvre aujourd'hui à Alger devait initialement avoir lieu au Mali et était programmée depuis plusieurs mois. Entre-temps, la région en question a été le théâtre d'épisodes de rapts d'étrangers, lesquels rapts s'apparentent comme étant le meilleur moyen pour les éléments d'El Qaïda au Maghreb de faire pression sur certains gouvernements occidentaux et ce, généralement aux fins d'arracher la libération de leurs acolytes détenus dans leurs geôles, en contrepartie de rançons gracieusement payées par les gouvernements concernés, un argent qui servira à réalimenter les réseaux terroristes et à financer les actions des groupuscules encore en activité. Face à cette situation qui fragilise davantage la sécurité de la région sahélo-sahélienne, retarde gravement son développement et accentue la misère de ses populations, la concertation et la coopération entre pays riverains s'avèrent vitales. Le phénomène a pris une dimension trop importante et si tentaculaire qu'aucun pays de la région ne peut se permettre d'agir seul et a fortiori lorsqu'on sait que la majorité des Etats concernés se plaignent de l'inexistence de ressources matérielles et financières ou sont trop faibles pour pouvoir s'en sortir seuls. A une plus grande échelle, les événements ont démontré aussi la nécessité d'une concertation internationale contre l'activisme terroriste et ce, notamment depuis le tournant historique du 11 septembre 2001. Dans cette optique, l'Algérie fait partie des pays qui défendent fermement la thèse du refus catégorique de négocier des contreparties financières avec El Qaïda au Maghreb en échange de la libération de l'un des leurs. Mais l'Algérie ne peut convaincre de l'intérêt et de la sagesse de cette démarche sans la coopération de ses partenaires riverains. Le récent épisode des otages français libérés par le gouvernement malien monnayant une forte rançon du gouvernement français a démontré les failles qui peuvent émailler cette coopération recommandée et si indispensable. Que le Mali ait fini par céder aux pressions de la France au détriment des intérêts sécuritaires de toute la région n'était pas du goût de l'Algérie qui le lui a fait comprendre. Car il n'y a pas de puissances et de sous-puissances quand il s'agit de coordonner et de s'entendre sur la sécurité et le bien-être des populations. Toutes les vies humaines se valent et ce ne sont pas les guerres civiles, les génocides et autres misères de l'Afrique subsaharienne qui autoriseraient les plus grands à sacrifier ces populations pour arracher un concitoyen européen des griffes d'El Qaïda. Que les Africains meurent par dizaines, pour une raison ou une autre, ne devrait pas autoriser les Occidentaux à dénigrer ces citoyens ou à les considérer comme de seconde zone, quand bien même leur vie serait dénigrée par leurs propres dirigeants. La possession des moyens et des technologies de pointe par certains pays ne devrait pas être un prétexte pour imposer une quelconque position. Et c'est à juste titre que le directeur par intérim du Centre africain d'étude et de recherche sur le terrorisme (CAERT), Lies Boukraa, a jugé utile de préciser hier que «l'assistance des puissances occidentales aux pays du Sahel dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ne doit pas dégénérer en une ingérence étrangère dans les affaires de ces Etats». Aussi la rencontre d'aujourd'hui est-elle de nature à remettre les pendules à l'heure si les pays concernés veulent parvenir à la mise en place d'une stratégie efficace et durable à même de leur permettre de relever les différents défis. M. C.