Photo : S. Zoheir Par Abdelkrim Ghezali Le phénomène des bidonvilles a pris une ampleur dramatique pour certains citoyens qui sont dans un réel besoin de relogement dans des conditions décentes. Ces derniers n'ont jamais bénéficié d'un logement ou ont été chassés par la misère ou le terrorisme de leurs lieux initiaux de résidence. Avant l'indépendance et juste après, les campagnes ont connu un exode phénoménal vers les villes. Les populations rurales ont subi les affres du colonialisme et son lot de dépossessions, d'errances et de privations. Pour ces milliers de gens, la ville signifie plus de chances de trouver du travail et un espace d'éducation pour les enfants. La révolution agraire a été pensée justement pour sédentariser les paysans et stabiliser les populations rurales en leur offrant tous les moyens et infrastructures d'une vie décente. Mais la faillite de ce projet généreux a remis les compteurs à zéro pour que l'agriculture soit sinistrée et pour que le problème des régions rurales devienne un problème sociologique et politique et dont l'ampleur sera vérifiée pendant la décennie noire avec le terrorisme qui a fini par vider les campagnes. Pendant cette période tragique, le déplacement des populations a atteint son apogée et les bidonvilles qui ceinturaient les villes, grandes et moyennes, ont pris des dimensions telles qu'ils sont devenus source de menace sur la sécurité. Si l'Etat et la société peuvent comprendre ces citoyens qui fuient la misère et le terrorisme pour s'installer dans des bidonvilles où la vie est dure et aussi insupportable que les raisons de leur déracinement, il est inacceptable de céder au chantage et à la pression d'un grand nombre de personnes qui font du «bidonvillisme» une activité très lucrative avec la complicité de certains responsables locaux qui non seulement laissent faire, mais participent à cet «affairisme» dont ils ne mesurent pas les conséquences sociales, économiques, sanitaires et sécuritaires. Ces affairistes installent des baraques de fortune dans des bidonvilles ou font pousser carrément un bidonville au milieu d'un quartier ou à la périphérie d'une cité, s'inscrivent sur la liste d'attente de logements sociaux, bénéficient d'un logement social, le vendent, se réinstallent dans un autre bidonville et relancent la procédure d'acquisition d'un autre logement et ainsi de suite ad aeternam. Pourtant, des citoyens respectueux des lois, vivant dans des conditions difficiles, dans des logements loués à prix forts, chez des parents dans une promiscuité invivable, formulent une demande de logement dans les règles, optant, en fonction de leurs moyens, pour la formule qui leur sied, mais les trafiquants passent souvent avant eux, alors que la majorité n'accède jamais à un logement social, LSP, AADL ou promotionnel. Cette situation fait dire à ceux dont l'attente d'un logement a trop duré qu'il ne leur reste qu'à s'installer dans un bidonville, recourir à l'émeute et à la pression pour pouvoir bénéficier d'un logement. Les pouvoirs publics sont appelés à faire sérieusement la part des choses et à séparer le bon grain de l'ivraie au risque d'assister à une situation inextricable et de ne jamais régler le problème du logement en Algérie. L'élaboration d'un fichier national pour le logement social, LSP, AADL et promotionnel est une urgence stratégique et ce, parallèlement à des enquêtes que doivent mener les services de toues les wilayas et des daïras sur tous les demandeurs de logement.