De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi «Le sujet hémophile devrait s'initier à la prophylaxie primaire.» C'est le programme, voire l'objectif, du moins à court terme, du chef du service d'hématologie au CHU Ben Badis, le professeur référent M. Sidi Mansour. A ce sujet, des médecins exerçant dans différents CHU de l'est de l'Algérie vont être sollicités le 3 avril prochain pour une journée d'étude, préambule à la mise en place d'un «réseau local régional de la prise en charge des hémophiles». «Il est inconcevable qu'un malade habitant une région excentrée du CHU fasse le déplacement pour une consultation qu'il peut effectuer dans sa périphérie si une équipe médicale y est bien formée. A travers cette journée d'étude, nous allons définir le contour d'une nouvelle stratégie pour une meilleure prise en charge de cette pathologie. Une option qui appelle tous les acteurs du secteur à y adhérer», explique ce spécialiste, soutenant qu'«il faut rapprocher les malades des centres sanitaires de leurs localités respectives, qui, à l'avenir, seront dotées de médecins formés spécialement pour la prise en charge des hémophiles. Et pour des cas urgents, le transfert se fera évidemment vers Constantine». En plus de cette perspective ambitieuse, voire allant dans le sens de la politique de la réforme hospitalière en une partie, notre interlocuteur a initié, il y a une année, un chapitre consacré à l'éducation sanitaire. Il dira à ce propos : «Le but de cette approche demeure l'explication de la maladie aux parents ainsi qu'à leurs enfants. Dès lors, un second groupe de malades suivra des séances d'éducation et sera désigné incessamment» et de soutenir : «La finalité recherchée à travers ‘‘ces leçons'' est l'aboutissement à la prophylaxie.» Pour l'année 2010, le service a fixé des objectifs bien distincts. M. Sidi Mansour entend «consolider les acquis ; les moyens humains sont bien formés par l'acquisition de matériel, de réactifs, de médicaments». Un canevas qui étoffera les dispositifs déjà mis en place en 2007 et qui s'était traduit, selon notre même interlocuteur, par «l'acquisition d'unités d'hémophilie et de maladies hémorragiques héréditaires. Aussi, une équipe pluridisciplinaire a été mise en place, s'occupant de divers angles de la maladie dont des séances de kinésithérapie adaptées aux hémophiles». Toutes ces avancées ont été concrétisées au terme d'un partenariat signé avec le CHU de Strasbourg qui accueille des médecins pour des stages de formation et de perfectionnement. D'ailleurs, à ce titre, le chef de service nous annoncera la tenue des 3es journées consacrées à l'enseignement post-universitaire sur l'hémophilie du 23 au 26 avril prochains intitulées «Constantine-Strasbourg sur l'hémophilie et les maladies». Le service d'hémophilie du CHU accueille quotidiennement 20 patients par jour entre consultations et prises en charge. C'est le traitement ambulatoire qui prédomine sauf pour les cas jugés graves nécessitant une hospitalisation. M. Sidi Mansour poursuivra : «L'organisation prime et ce, à la faveur d'une équipe pluridisciplinaire que j'ai formée, et nous prenons correctement en charge les patients», indiquant qu'en matière de thérapie les médicaments sont disponibles même s'il arrive que de brèves pénuries de réactifs se déclarent comme c'est le cas actuellement. Il reste cependant à voir plus large pour assurer aux malades des traitements sans bousculade. Cela dit, la création d'une structure d'accueil de jour est plus que requise pour une meilleure prise en charge des patients. «On a sollicité l'administration pour nous attribuer la salle de prière inexploitée afin d'élargir l'hôpital de jour, en vain…» Pour de plus amples informations sur ce refus, nous avons pris attache avec le directeur du CHU, M. Zermane. Celui-ci a été catégorique en soutenant que «l'attribution de la salle n'est pas de mon ressort. Elle dépend de plusieurs organismes, dont la direction des affaires religieuses». S'agissant des statistiques sur l'hémophilie, cette affection hémorragique héréditaire, «une première enquête informative a été réalisée en 2000 et a été descriptive, exhaustive et transversale», selon une source médicale. Toutefois, M. Sidi Mansour estimera que le nombre d'hémophiles est sous-estimé, car peu d'enquêtes de prospection ont été entreprises chez des familles potentielles. Une démarche qui, dira-t-il, pourrait éviter aux personnes atteintes des complications, sinon comment expliquer que «tous les hémophiles adolescents sont handicapés». La prévention devra également être menée chez les personnes dites «conductrices». Le recours à l'examen anténatal servira pour beaucoup dans la détection des anomalies, mais ce genre de dépistage est quasiment absent en Algérie. «Et c'est aussi le propre pour toutes les maladies génétiques», atteste le professeur Sidi Mansour.