Dans l'un de ses sketchs, Coluche se plaignait de n'avoir qu'un bras bandé au moment où d'autres, plus vernis, pouvaient avoir un… cancer. C'est vrai qu'il n'y a pas si longtemps que cela, le cancer avait la réputation d'être un «bobo » de riches. Pour preuve, les personnes les plus «people» qui en étaient atteintes devenaient encore plus populaires de leur vivant et n'en mourraient paradoxalement que sur le tard quand même. Ainsi, les flèches indiennes qui n'avaient pas tué, même dans le «chiqué», dans sa jeunesse le célèbre John Wayne, le cancer le fera mais celui qui voulait réussir en politique et pas une carrière au cinéma mourra quand même relativement jeune à l'âge de 72 ans alors que Ronald Reagan, dont le souhait le plus cher était de faire le chemin inverse, à savoir réussir au cinéma et non pas devenir président des Etats-Unis mourut pour sa part à l'âge canonique de… 94 ans. Il est aisé donc de comprendre que Michel Colucci ait pour sa part «aimé» avoir un cancer et vivre plus longtemps, lui qui a disparu dans un tragique et tout aussi bête accident de la circulation. Les temps ont, toutefois, changé et l'expérience montre tout de même que, dans notre pays la tendance pour les hôpitaux est d'accueillir plus les pauvres que les riches. Toutefois, la différence n'est pas là et il serait morbide de faire des statistiques sur cet aspect des choses mais il faudrait plutôt stigmatiser les conditions dans lesquelles est dépistée cette pathologie chez la population, la nature de sa prise en charge et en bout de parcours son extrême… solitude. En matière de conditions d'accueil déplorables, de prise en charge défaillante, d'incapacité des corps professionnels concernés à accompagner humainement les patients, il est tout autant aisé pour les responsables à hauteur des établissements hospitaliers d'affirmer le contraire. La réalité de tous les jours dément heureusement, ou malheureusement, toutes les déclarations et attitudes béates formulées ou adoptées. Les moyens de traitement (chimiothérapie), entre autres, ne sont disponibles que dans les grandes agglomérations et ceux tenus de les subir, au-delà d'être d'extraction modeste et rarement en mesure de subvenir aux moindres frais de leur déplacement, résident plutôt loin. Même s'il vaut mieux ne pas être malade de quoi que ce soit, ne serait-ce d'une ordinaire rage de dents, ne pas être cancéreux en Algérie, c'est sans doute le meilleur cadeau dont peut bénéficier n'importe lequel de nos compatriotes. A. L.