De notre correspondant à Constantine Abdelhamid Lemili Contrairement aux saisons écoulées, le marché du ballon rond ne s'est pas trop emballé à Constantine. C'est du moins l'impression qui émerge parce que, selon la rumeur, entre ce qui se dit et ce qui s'est fait le fossé est bel et bien large. En tout état de cause, l'ASK, le MOC et le CSC ont vécu des fortunes diverses sur le plan du recrutement. Ce sont les Mouloudéens qui ont fait, contrairement à la saison écoulée lorsque le tonitruant Bouarrata, faisant dans l'anticonformisme ambiant, s'était interdit de recruter des stars autoproclamées et/ou ainsi statufiées par de perverses ou perverties règles du marché…, un marché en folie. Bouarrata, visant la filière oranaise que privilégiaient depuis presque une décennie les clubs de l'est du pays, déclarait à l'époque : «Aucun joueur ne fera de omra footballistique au MOC.» L'argumentaire du coach électrique tenait sans doute la route d'autant plus qu'il s'agissait en général d'éléments au crépuscule de leur carrière pour certains et pour la plus grande partie des joueurs dont le CV était des plus discutables parce que préfabriqué par une presse déchaînée et oublieuse, sinon peu soucieuse d'éthique et de déontologie. Les mauvaises langues disaient que certains parmi ces joueurs étaient, pour peu qu'ils étoffent leur carte de visite, même prêts à «rendre service» à un club donné sans contrepartie financière, exception faite de la prise en charge matérielle (intendance et logistique). Il n'en est pas moins demeuré certain que le recrutement de près de vingt jeunes joueurs, tout frais et nouveaux sur la scène, n'aura pas coûté plus d'un milliard de centimes (officiellement 7,5 millions de dinars), donc très certainement et surtout nettement moins que la signature apposée au bas d'un contrat, si contrat il y a eu, par les Mezaïr, Achiou ou Hemani. Pour l'anecdote, un jeune joueur, une valeur montante en fait, en l'occurrence Boulaïnine, était payé 10 000 DA/mois, soit 2 500 DA par rencontre… Une misère qui ferait pâlir de honte des… négriers. Evidemment, le MOC n'a pas eu à préserver sa trésorerie, et certains joueurs cadres ont quand même conduit les dirigeants à casser leur tirelire pour faire le point, voire l'appoint pour monter vaille que vaille une équipe homogène capable de conforter la théorie de Bouarrata et littéralement casser un dogme s'il réussissait son challenge, mais en même temps mieux assurer grâce à l'expérience de briscards incontournables. La suite montrera que le choix du coach constantinois avait plus que du bon même s'il en sera, lui-même, le fossoyeur et Madureira, son remplaçant, celui qui sera à l'origine du déclic mais sur le tard. Pour la saison 2008/2009, avec la venue d'une nouvelle direction, le Mouloudia a totalement renversé la vapeur optant pour un recrutement bling bling avec l'enrôlement de ce qui pourrait être, toutes proportions gardées, comme le must des musts de la deuxième division… visant forcément l'accession. Le cachet des Ouichaoui, Babouche, Abadli et d'autres relève évidemment du secret d'Etat. Ils sont indiscutablement importants et ils ne seront jamais connus sauf le jour de la tenue de l'assemblée générale et la lecture imposée du bilan. Cela n'empêche pas toutefois la circulation des plus folles rumeurs sur le montant d'untel ou d'un autre. Une pratique commerciale ou plutôt mercantile qui laisse la porte ouverte à toutes les spéculations possibles a posteriori. Autrement, une marge de manœuvre appréciable dans les négociations en cas de rupture de la relation pour incompatibilité d'humeur, performances non satisfaisantes du joueur concerné, prêt ou tout simplement cession au cours du mercato ou en période contractuelle. Valeur en… béton et odeur de… soufre Le tout est évidemment enrobé de la plus parfaite des légalités à l'image du contrat notarié en… béton mais à l'odeur de soufre. Ailleurs, dans un autre club, c'est pratiquement le remake du scénario mociste sauf que le staff dirigeant des Rouge et Blanc a anticipé en claironnant son incapacité à faire face aux charges qu'impose la reprise de la compétition. En fait, ce que ne disent pas les dirigeants, c'est que leur appel pressant d'argent frais se justifie plus par la disponibilité d'espèces sonnantes et trébuchantes immédiates à même de leur permettre de négocier avec «le produit encore disponible» sur le marché et au même titre que les autres clubs. La crédibilité de l'association dépend d'ailleurs en grande partie de la capacité de ses dirigeants à proposer ou du moins à s'aligner sur les… propositions impossibles. Les déclarations du président ou d'un porte-parole improvisé feront le reste. L'ASK recrute à… crédit, loge ses recrues étrangères à… crédit, effectue son stage en Tunisie à… crédit. C'est trop de violences et à la limite du masochisme que s'administrent des dirigeants dont le stoïcisme mériterait d'être publiquement reconnu. Alors qu'il est plus facile de vivre plus sereinement. Enfin, comble de l'ironie, c'est le CSC, l'autoproclamé doyen qui, à quelques semaines de la reprise, démarre dans le doute, reprenant l'expérience tentée par le Mouloudia de Constantine l'année dernière mais plus pour des raisons imposées, au corps défendant de ses responsables, que par un choix voulu en ce sens que l'association est financièrement sur les genoux. Les Clubistes en sont encore à tester des joueurs. C'est dire que ceux qui, plus ou moins, disposent d'un C.V. ne se bousculent pas au portillon à telle enseigne que deux ou trois éléments parmi ceux qui ont été retenus par le staff dirigeant jouent encore les… capricieux, histoire de voir s'ils ne sont pas en train de faire le mauvais choix en restant au club. Il est toutefois honnête de souligner que Mourad Mazar, le nouveau président, avait annoncé la couleur alors qu'il n'était que candidat : «Je tiens à informer les membres de l'assemblée générale que je n'ai pas 20 centimes sur moi. Néanmoins, à défaut d'argent, j'ai des idées, un carnet d'adresses important qui me permet de fréquenter et tutoyer les plus grandes personnalités de la planète football sur le plan international, des relations qui, je suis convaincu, serviront au CSC et le sortiront de son anonymat.» Est-il possible d'être poète dans une activité dont vivent des milliers de personnes ? Dans cet ordre d'idées, le football, et surtout le CSC, relève presque de la dévotion mystique au sein de la famille clubiste. Un tel choix, dicté d'ailleurs par une réalité implacable, a déjà laissé fuser des clameurs hostiles du public lors des séances d'entraînement des Vert et Noir que nous avons eu le loisir de vivre. Cette hostilité s'estompe peu à peu et les supporters commencent à adopter de très jeunes joueurs inconnus jusque-là, se persuadant en leur for intérieur que tout est possible d'autant plus que le nouvel entraîneur serbe semble sûr de son fait et, non sans aplomb, parle d'accession. En conclusion, le marché local, sur le plan de l'ostentation affichée, n'aura pas été exceptionnel. Les véritables tractations se sont faites en underground et les premiers résultats détermineront qui a fait le bon choix comme ils apporteront forcément la preuve que ce n'est pas la valeur marchande des joueurs payés cher et rubis sur l'ongle qui compte mais plus celle, intrinsèque, d'éléments anonymes auxquels il serait enfin donné une chance de se faire une place au soleil. La suite ne sera qu'un éternel recommencement.