Photo : Riad De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad Depuis près de deux décennies, le chômage est la caractéristique la plus répandue de la jeunesse de Kabylie qui se sent complètement abandonnée, même quand les plus chanceux accèdent, au bout de péripéties interminables, aux dispositifs d'aide à l'emploi de jeunes. La catégorie des sans-emploi représente 25,6 de la population en âge de travailler, selon un taux officiel de chômage dans la wilaya de Tizi Ouzou rendu public en 2006 par une direction de wilaya. Un taux loin de refléter la réalité du grave mal endémique qui affecte la Kabylie où tous les épiphénomènes tels que la drogue, la délinquance et la violence ont pris des propensions incroyables sous le regard complice des institutions et autorités locales qui se cachent derrière une litanie de «contraintes» pour justifier l'état délabré de tous les secteurs d'activité. Des responsables au niveau des communes plus ou moins nanties en fiscalité ont avancé un taux de chômage inouï qui avoisine les 60%. Alors que dire par exemple des localités du sud de la wilaya de Tizi Ouzou telles que Draa El Mizan et Tizi Ghennif complètement oubliées depuis des décennies des rares et insignifiants programmes d'Etat. Des milliers d'habitants de ces localités rayées du développement, sans investissements, sont en proie au désespoir total ! S'il est admis que, sans la volonté politique de sortir la région de cette grave situation, rien ne bougera dans le sens du progrès, les mécanismes de lutte contre le chômage initiés par les ministères concernés demeurent à ce jour inefficaces et sans influence sur les offres d'emploi et le niveau de vie de la population. «Les dispositifs d'insertion de jeunes sont loin de pouvoir prendre en charge le nombre de demandeurs», reconnaissait il y a plusieurs années la direction de l'emploi de Tizi Ouzou qui évoquait «certaines difficultés que rencontrent les jeunes auprès des institutions bancaires devenues restrictives dans l'accompagnement des jeunes promoteurs, à savoir l'octroi des crédits». Ce sont aussi des «contraintes», les mêmes que celles citées pour les autres secteurs qui sont encore évoquées pour ne pas honorer le programme des 100 locaux par commune promis par Bouteflika durant sa campagne présidentielle d'avril 2004. Au total, on a été incapable de livrer les 1 000 locaux sur les 6 700 prévus pour la masse des chômeurs des communes de la wilaya de Tizi Ouzou avant le début de l'année en cours (2010). Dans la quasi-totalité des communes, mêmes promesses non tenues, mêmes faux-fuyants de la part de l'administration et mêmes impatiences du côté des jeunes désœuvrés. Que du vent ! A titre d'exemple, à Draa Ben Khedda, à 11 kilomètres à l'ouest du chef-lieu de wilaya, les 126 locaux promis aux milliers de chômeurs de cette ancienne ville n'ont pas encore vu le jour. Répartis sur plusieurs sites après avoir connu un retard dans le lancement des chantiers, ils ne semblent pas avancer dans la voie de la concrétisation. Les 52 locaux du village Aïn Fassi, périphérie de la ville de Draa Ben Khedda, lancés vers la fin de l'année 2007, connaissent un taux de réalisation d'à peine 60%, selon un responsable local qui déplore «un retard de plusieurs mois». Ceux de la cité Bennani (33 locaux) seraient à seulement 35% du taux d'avancement, les 20 autres locaux situés sur la route du lycée à 10% et, enfin, les travaux des 34 locaux de la cité EPLF n'ont même pas démarré. Cette situation pourrait être étendue aux autres communes de la wilaya où le programme des 100 locaux est relégué au second plan dans les démarches timides d'aider les jeunes à trouver une occupation de leur choix et rémunérée. «Manque d'assiettes foncières pour l'implantation du programme et absence d'engouement de la part des entreprises qualifiées présentes dans la région», sont les arguments qui reviennent le plus souvent dans la bouche des responsables pour justifier la non-livraison des locaux dans les quatre coins de la wilaya de Tizi Ouzou. A Aïn El Hammam, à 70 kilomètres de Tizi Ouzou, seuls 68 locaux sur les 114 prévus sont en voie d'achèvement pour cause de menaces de glissement de terrain. Dans certaines autres communes, on choisit un site avant de se rendre compte de son inadéquation avec le projet et de décider par la suite de sa «délocalisation» vers un autre terrain. Le wali est allé dans ce sens en évoquant un manque d'entreprises et un nombre important de chantiers en cours de réalisation qui endommageraient l'action du développement local. Aussi, les autorités avaient prévu d'engager des prospections d'assiettes pour le reste des locaux à construire, c'est-à-dire pour la majorité écrasante du programme à réaliser. Combien de temps dureront encore l'attente et la patience des jeunes chômeurs ?