Synthèse de Ghada Hamrouche Les Polonais ont commencé à voter hier pour élire un successeur au président Lech Kaczynski, qui a trouvé la mort le 10 avril dernier dans un accident d'avion près de Smolensk, en Russie. Les deux favoris, Bronislaw Komorowski, président du Parlement qui assure l'intérim du chef de l'Etat, et Jaroslaw Kaczynski, frère jumeau du défunt président, sont tous deux issus du combat mené par le syndicat Solidarité jusqu'à la chute du régime communiste, en 1989. Tous les sondages donnent Komorowski, candidat de la Plate-forme civique (PO, droite libérale, majoritaire), vainqueur de l'élection. Mais Jaroslaw Kaczynski, de Droit et Justice (PIS, droite conservatrice), a rattrapé une partie de son retard en menant notamment campagne sur le thème de la solidarité après la tragédie provoquée par la mort de son frère et les inondations catastrophiques de ces dernières semaines. Mais il semble aujourd'hui improbable que Bronislaw Komorowski puisse envisager une élection dès le premier tour (il lui faudrait pour cela obtenir plus de 50% des suffrages exprimés). Un second tour, le 4 juillet prochain, est l'hypothèse la plus probable.Huit autres candidats sont en lice mais la campagne en forme de duel les a privés de toute ambition. Komorowski recueillerait selon les derniers sondages 38 à 48% des intentions de vote au premier tour contre 29 à 36% pour Kaczynski. La Constitution polonaise accorde l'essentiel des pouvoirs politiques au gouvernement, que dirige Donald Tusk (PO). Mais le Président peut opposer son veto à des lois, procède à nombre de nominations, dont le gouverneur de la Banque centrale et influence la politique étrangère et de sécurité. Lech Kaczynski, élu en 2005, avait ainsi bloqué certaines réformes d'inspiration libérale voulues par le gouvernement Tusk, comme les retraites, la santé ou les médias. Le Premier ministre redoute que son frère, en cas d'élection, ne perpétue cette tradition du veto et transforme la Présidence en quartier général du PiS en vue des législatives de l'année prochaine. «Un succès de Jaroslaw Kaczynski, ce serait un enfer politique”, a-t-il récemment déclaré, accusant les partisans du candidat conservateur de mener une campagne de dénigrement visant «à prouver que Tusk collabore non seulement pour la Wehrmacht mais aussi pour l'Armée rouge et que Komorowski est le laquais des grandes puissances menées par la Russie». Au début de la campagne électorale, les choses étaient relativement claires : à Kaczynski les voix de l'électorat âgé, rural et catholique, à Komorowski l'électorat urbain et plus jeune. Mais Kaczynski a surpris les observateurs en faisant activement campagne auprès des électeurs centristes. Il a su projeter une image conciliante et éviter les remarques caustiques qui avaient caractérisé son passage à la tête du gouvernement, en 2006-2007. Jaroslaw Kaczynski, qui fêtera ses 61 ans vendredi prochain, a sans doute bénéficié d'un regain de sympathie envers sa famille parmi les Polonais, frappés par la mort soudaine de son frère jumeau dont il avait toujours été proche. Les deux candidats ont consacré nombre de leurs déplacements de campagne aux victimes des inondations du printemps, qui ont fait vingt morts et des dizaines de milliers de sans-abri. En 2005, lors de la précédente présidentielle, la participation au premier tour avait été relativement basse, avec 49,75% des inscrits.