Les Guinéens ont participé massivement et dans la sérénité, dimanche dernier, à la première élection libre depuis l'indépendance en 1958. Après un demi-siècle de dictature, 4,2 millions de Guinéens étaient appelés dimanche à choisir leur Président parmi 24 candidats, tous des civils. Une première élection, disent-ils, où le résultat n'est pas connu à l'avance. Les résultats de ce scrutin, ne seront, cependant pas connus avant une semaine. La Commission électorale nationale indépendante (Céni), qui n'avait jamais organisé un tel scrutin, a conclu dans la soirée qu'aucun incident ne lui avait été signalé, ni à Conakry ni dans les régions. Les chefs des missions d'observation électorale de la Cédéao, de l'Union européenne, de l'Union africaine et du Centre Carter ont salué «l'engagement des électeurs guinéens qui se sont rendus nombreux aux urnes pour déterminer dans la paix et la sérénité le futur» du pays. «En 50 ans, c'est la première fois que la Guinée va à des élections libres et transparentes», avait auparavant résumé l'ex-général Sékouba Konaté, président de la «transition» depuis six mois. L'officier s'est dit fier d'avoir tenu «parole», lui qui s'était engagé le 15 janvier à mener le pays vers une élection, sans qu'aucun militaire ni dirigeant sortant ne soit candidat. Dans ce scrutin très ouvert, trois candidats sont donnés favoris : un opposant à tous les régimes depuis l'indépendance, Alpha Condé, ainsi que les anciens Premiers ministres Sidya Touré (1996-1999) et Cellou Dalein Diallo (2004-2006). Ce dernier a déclaré qu'il faudrait «respecter le choix des urnes, quel qu'il soit» et a jugé que l'élection se déroulait «dans la transparence souhaitée». Les résultats provisoires ne devraient pas être connus avant mercredi et la proclamation des résultats définitifs est prévue dans les huit jours. Un second tour sera organisé le 18 juillet si aucun candidat n'a obtenu la majorité absolue. Pendant la campagne, les Guinéens ont exprimé un immense appétit de justice sociale. Leur pays, premier exportateur mondial de bauxite, dispose de richesses minières considérables mais la moitié de sa population de 10 millions d'habitants vit encore en dessous du seuil de pauvreté. Le pays reste aussi traumatisé par le massacre du 28 septembre 2009, quand des militaires ont tué au moins 156 personnes et violé des dizaines de femmes, au cours d'un rassemblement politique de l'opposition. Depuis 1958, date de son indépendance, la Guinée ancienne colonie française, avait d'abord connu les 26 ans de règne du «Président à vie» Ahmed Sékou Touré (1958-1984). Puis Lansana Conté s'était imposé pour 24 années de régime militaire autoritaire (1984-2008). Enfin, à la mort de Conté, fin 2008, des officiers putschistes conduits par le capitaine Moussa Dadis Camara avaient promis de faire le bonheur du «bas peuple», avant d'enfoncer le pays dans le marasme et la désolation. R. I.