Débat fort intéressant, hier à l'Ecole supérieure des affaires (ESSA), sur les «think-thank» dans les pays du Maghreb, organisé par le Cercle d'action et de réflexion autour de l'entreprise (CARE), un sujet animé par Khadidja Mohsen, docteur en sciences politiques. Par définition sommaire, les «think-thank», c'est la «production permanente d'idées neuves», un processus animé par des acteurs du savoir, en mesure de contribuer aux changements, au sens large du terme, ce sont eux qui donnent forme aux idées et qui les conceptualisent, explique Khadidja Mohsen. Est-ce une définition consensuelle ? La conférencière reconnaît qu'il est des élites qui n'y sont pas réceptives et qui ne se reconnaissent pas dans une telle définition. Les think-thank diffèrent, et c'est souvent le cas, en fonction de l'économique mais surtout du politique. Ils prennent en fait du sens selon que l'on soit dans une culture libérale ou autoritaire… Aussi Khadidja Mohsen a-t-elle parlé de frontière entre l'élite et le pouvoir politique. Le trait est «mince», entre les deux, a-t-elle jugé. Le pouvoir politique, l'organisme «think-thank» ne doit pas en être trop distant. Il ne doit pas en être trop proche, non plus, a-t-elle recommandé. Cela renvoie à cette image du «think-thank» «élégamment» entretenue dans certains pays, à l'exemple de la Chine, un pays à l'économie très développée, mais à la politique verrouillée. Pour la conférencière, la Chine a tiré profit de sa diaspora. Elle fait de celle restée au pays des «think-thank» et consulte celle qui en est sortie. Et au Maghreb ? Khadidja Mohsen souligne connaître le phénomène des «think-thank» en Tunisie et au Maroc pour y avoir fait des recherches. Elle dit qu'au Maroc, «rien n'est fait au hasard et rien n'est laissé au hasard». Et, d'ajouter dans un style empreint d'humour qu'au Maroc, «on vous séduit comme les Marocains savent bien le faire». Elle remonte l'histoire, notant que, dans ce pays, les «think-thank», existaient sous d'autres appellations, elle a même exhumé des «actions sultaniennes» (sultan). Mais l'oreille du décideur est-elle attentive ? La conférencière estime qu'elle est «diffuse» et «indirecte». Un livre mal accepté par les décideurs, ou pas du tout, peut contribuer au changement, a-t-elle résumé. Selon un document du CARE, les «think-thank» sont estimés à «5 000 dans le monde». Ils sont considérés comme de «puissants» espaces d'influences des politiques publiques. Le CAR estime par la voix de son président que les «think-thank» sont nécessaires à la promotion d'un dialogue et d'un partenariat public-privé. Y. S.