Un échange d'espions sans précédent depuis la fin de la guerre froide s'est effectué à l'aéroport de Vienne où les Etats-Unis ont remis à la Russie ses 10 agents contre quatre Russes, dont trois condamnés pour espionnage au profit des Occidentaux. Dans un final digne de la guerre froide, l'échange est intervenu sur le tarmac de l'aéroport de Vienne. L'avion transportant les espions russes expulsés des Etats-Unis dans la nuit a atterri à Moscou, tandis que celui portant les agents accusés de travailler pour les Occidentaux s'est posé à Washington. Le Foreign Office s'est abstenu de tout commentaire, tout comme la CIA. Selon des témoins, les agents secrets ont été transférés d'un appareil à l'autre à bord d'un petit car de couleur noire aux vitres teintées. Dans une mise en scène soigneusement calibrée, le positionnement même de l'avion venu de New York empêchait photographes et caméramen présents de voir la porte de l'appareil. Jeudi, les 10 agents arrêtés fin juin sur le sol américain avaient plaidé coupable devant le tribunal fédéral de New York et la justice avait annoncé leur «expulsion immédiate» des Etats-Unis. De son côté, le président russe Dimitri Medvedev a signé la grâce pour les quatre Russes. Un porte-parole de la Maison-Blanche a confirmé que l'échange avait été négocié au plus haut niveau entre les chefs des services de renseignement extérieur russe et américain. Il a par ailleurs révélé que la Maison-Blanche avait été informée de l'existence du réseau d'espions russes dès le mois de février et que le président Barack Obama avait été personnellement mis au courant de l'affaire le 11 juin. Parmi les 10 personnes expulsées vers la Russie se trouve la figure emblématique de cette affaire, Anna Chapman, dont les détails de la vie ont fasciné les médias. Les quatre Russes libérés ont été identifiés comme Igor Soutiaguine, un expert russe en armement stratégique condamné à 15 ans de prison pour espionnage au profit des Etats-Unis, Sergueï Skripal, un ex-colonel du renseignement militaire condamné à 13 ans de détention pour avoir travaillé avec les services britanniques, et un ex-responsable du SVR (renseignement extérieur russe), Alexandre Zaporojski condamné à 18 ans de camp pour avoir transmis des informations à la CIA. Le quatrième, Guennadi Vassilenko, est un ancien agent du KGB reconverti dans la sécurité privée. Officiellement, il a été condamné en 2006 à trois ans de prison pour des délits sans rapport avec l'univers du renseignement. Les prisonniers russes vont être pris en charge par la CIA, a assuré sur la chaîne CNN Frances Townsend, qui fut conseillère du président américain George W. Bush pour la Sécurité intérieure et la lutte antiterroriste. Moscou a souligné que l'échange a pu avoir lieu en raison de l'amélioration récente des relations russo-américaines. M. B.