La visite d'Etat qu'effectue depuis aujourd'hui le président de la République en Iran confirme la poursuite de la lune de miel qui existe entre les deux pays depuis 2000. Parce que, depuis au moins l'indépendance de l'Algérie, Alger et Téhéran ont eu des relations qui ont eu des hauts et des bas sur le plan politique. Et la susceptibilité a souvent pris le dessus sur un pragmatisme que les deux pays ont su employer dans d'autres domaines, notamment économique. Et c'est justement sur une base économique que les deux pays ont réussi à faire bloc commun sur le plan politique. Et c'est ainsi que l'Algérie et l'Iran deviennent deux acteurs incontournables dans l'Organisation des pays producteurs du pétrole, OPEP. C'est au sein de cette organisation que les deux capitales ont renforcé leur entente. Et cette entente cordiale était beaucoup plus expressive durant le règne des chahs, durant les années 1970. C'est durant cette période que l'Iran et l'Irak avaient choisi l'Algérie pour signer les Accords d'Alger qui ont notamment régi les différends frontaliers entre les deux pays voisins. L'accord, jamais réellement respecté, est, théoriquement, toujours en vigueur. C'est toujours l'Algérie, par l'entremise du défunt Mohamed Seddik Benyahia, alors ministre des Affaires étrangères, qui a permis de libérer en 1981 des otages américains détenus par le régime islamique depuis son instauration en 1979. Ce sont d'ailleurs les bonnes relations qu'entretenaient Alger et Téhéran qui avaient poussé Benyahia à tenter une médiation entre l'Iran et l'Irak pour arrêter la guerre déclenchée en 1980. Le ministre algérien n'avait cependant pas réussi sa mission puisque son avion explosa en plein vol, sur la frontière entre l'Irak, l'Iran et la Turquie, un jour de mai 1982. A l'arrêt du processus électoral en janvier 1992, certaines voix politiques en Algérie avaient accusé certains pays, dont l'Iran, de faire partie des soutiens les plus actifs aux extrémistes du FIS. Les soupçons de l'Algérie ont fini par pousser le gouvernement à suspendre toute relation diplomatique avec le régime iranien. C'est le début d'une période de froid glacial dans les relations politiques entre les deux pays. La situation reste en l'état sept ans durant. Jusqu'en 2000. En cette année qui marque le début du millénaire, l'Algérie a un nouveau président, Abdelaziz Bouteflika, et à la tête de l'Iran, depuis 1997, un réformateur ouvert sur le monde, Mohamed Khatami. Le contexte mondial est propice et les deux chefs d'Etat se rencontrent, en septembre 2000, en marge de l'assemblée générale des Nations unies. C'est le début d'une nouvelle relation basée, notamment, sur le thème du choc des civilisations que défendent les deux Présidents. Les retrouvailles entre Alger et Téhéran ont donc été scellées avec la visite d'Etat effectuée par Abdelaziz Bouteflika en Iran au printemps 2003. Le chef de l'Etat iranien de l'époque, Mohamed Khatami, se rend de son côté en Algérie une année plus tard. Sans parler des rencontres entre les deux Présidents et d'autres hautes responsabilités dans divers endroits. L'élection de Mahmoud Ahmadinejad en 2005 n'a pas changé la donne. Si le chef de l'Etat iranien a mis deux ans pour effectuer une visite d'Etat en Algérie, à l'été 2007, il a cependant affiché ses intentions de garder de bonnes relations avec Alger. Normal, puisque les deux pays entretiennent des ambitions de devenir, ou de rester, les leaders de leurs régions respectives. Du côté algérien, la confiance semble être partagée. Dans la crise du nucléaire iranien, par exemple, Alger se range du côté de Téhéran qui «aspire légitimement à détenir la technologie nucléaire civile», comme le souhaite d'ailleurs notre pays. Et la visite du président Bouteflika n'est donc qu'un autre ciment d'une solide relation qui fait, apparemment, abstraction des régimes en place dans les deux capitales. A. B.