Photo : Sahel De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad Des propriétaires d'agence immobilière de Tigzirt, sur la côte kabyle, n'oublieront pas de sitôt la saison estivale qui s'achève vu les déceptions nombreuses et successives qu'elle a suscitées depuis le début de l'été particulièrement pour la location d'appartements et de villas et l'affluence des estivants de façon générale. Cela en sachant qu'il est impossible d'établir pour le moment une liste des locations proposées au public durant les trois mois de l'été en raison de l'apparition du phénomène du contrat verbal de particulier à particulier dans les villages et villes de la Méditerranée. «C'est la disette», résume, dépité, Ferhat, jeune gérant d'une agence immobilière à quelques centaines de mètres des principales plages tigzirtoises. Il affirme que l'été a débuté très mal avec une demande de location «très faible» comparée à celle de la saison dernière. Ici, inutile de s'étonner quand on apprend qu'un hôtel de Tigzirt haut standing réputé pour son professionnalisme n'a enregistré les deux jours du week-end dernier que… trois clients dont l'un avait le matin même émis le vœu de partir alors qu'il avait auparavant souhaité profiter de la mer en famille au moins pour une petite semaine, selon l'aveu du patron de l'établissement. Ferhat tente d'expliquer cette mauvaise passe en essayant de se convaincre d'abord lui-même de ses propres arguments : «Je ne peux pas dire qu'il n'existe pas de demandes de locations de villas et d'appartements mais c'est vraiment en deçà de nos attentes surtout que les autorités locales ont fait des efforts cette année pour donner un meilleur visage de notre ville, en ce qui concerne l'hygiène et la sécurité, mais que voulez-vous, c'est bientôt le Ramadhan. Les gens font des économies, le faible pouvoir d'achat touche de nos jours presque tout le monde, on se dirige tout droit vers une société sans classe moyenne, le pauvre et le riche, c'est vraiment regrettable !» dit-il en soulignant les «tracasseries» liées à la location d'appartements et villas pour des particuliers. Il déclare à ce sujet que «les locataires saisonniers ne respectent souvent pas le contrat de location ; vous avez par exemple quelqu'un qui se présente pour louer un F3 pour sa petite famille et au bout milieu de son séjour vous constatez qu'il loge toute sa famille, sa belle-famille, ses amis avec tous les inconvénients et les désagréments que ça cause dans le voisinage de l'appartement. Et le propriétaire ne reste pas dans ce cas les bras croisés». L'autre paramètre dissuasif entré dans toutes les prévisions des propriétaires est celui de la situation sécuritaire instable qui prévaut dans la région depuis le début des années 1990 jusqu'à nos jours. Celle-ci s'est dangereusement dégradée ces dernières années, au moment où des régions du pays plus exposées au phénomène du terrorisme et autrefois infestées de maquis terroristes commencent à reprendre un cours de vie plus ou moins normal. Les deux derniers attentats kamikazes des 3 et 10 août derniers contre respectivement la sûreté des RG de Tizi Ouzou et un poste de contrôle sur une plage à Tigzirt ainsi que l'élimination le 7 du même mois de 12 terroristes à Beni Douala parmi lesquels figureraient «des responsables du GSPC», confirment cette tendance dangereuse qui prédomine en Kabylie. «L'insécurité, c'est un argument imparable qui nous laisse bouche bée devant nos vis-à-vis ; il y a beaucoup de gens aisés de Tigzirt qui habitent Alger et qui aimeraient bien passer quelques jours de vacances chez eux mais ils changent d'avis rien qu'en entendant tout ce qu'on raconte sur les mauvaises surprises qui pourraient les guetter sur la route de Tigzirt», affirme un résidant. Cela dit, il ne faudra pas négliger que les tarifs des diverses locations ne sont pas pour appâter les éventuels clients. Ferhat propose des villas situées entre la ville de Tigzirt et Sidi Khaled (à environ 7 kilomètres à l'est de Tigzirt) à des prix qui varient entre 250 000 et 10 000 dinars ; des sommes hors imagination pour le commun des Algériens. Un propriétaire d'un grand immeuble au centre-ville propose des appartements à 3 000 DA/ jour. Toujours loin du compte du fonctionnaire ou du simple travailleur. Un homme d'un certain âge note qu'à ce prix «il vaut mieux aller dans un hôtel de luxe de Tigzirt en demi-pension avec en moyenne 4 500 DA jour, c'est plus confortable et la qualité du service est impeccable». Des palabres qui n'améliorent en rien la qualité du tourisme dans la belle région qui s'enlise dans la pauvreté et l'insécurité.