Jeune et pleine de vie, elle s'est éteinte hier matin à 2h alors que les siens s'attendaient au meilleur. Ghania Rechidi, née Mekhoukh, alias Ghania Cherif pour les auditeurs de la Chaîne III et pour bon nombre de journalistes, avait 43 ans. Six ans plutôt, elle avait résisté avec force à la leucémie et s'était complètement rétablie au grand bonheur de sa famille et de ses amis. En juillet dernier, le contrôle régulier qu'elle faisait tous les trois mois, n'avait rien révélé d'anormal quant à une éventuelle rechute, d'autant plus qu'elle a dépassé le cap des cinq ans après la greffe qu'elle a subie le 21 janvier 2004. Ghania a néanmoins été hospitalisée pendant douze jours pour ce qu'elle considérait comme des petits problèmes de santé. Quatre jours avant son décès, elle, son mari et sa famille ont appris ce qui était redouté : une rechute. Sa famille et ses amis se sont mobilisés pour lui venir en aide, mais la maladie en a décidé autrement. La douleur des siens est d'autant plus immense que personne ne s'attendait à une disparition aussi rapide. Mahmoud, son époux et compagnon de route, a été informé hier matin du décès de Ghania, alors qu'il s'était permis un moment de repos après les efforts physique et mental fournis ces derniers jours pour soutenir sa femme. Peiné mais faisant preuve d'un grand courage face aux amis qui lui présentaient leurs condoléances, Mahmoud a semblé fondre quand il s'est rendu compte qu'il devait informer sa fille de 12 ans. Il savait que c'est lui qui devait le faire, mais se demandait comment le lui annoncer et comment supporter la douleur de la petite, très attachée à sa mère. Une mère, une épouse, une amie, une camarade de tous les combats justes, de toutes les causes nobles, Ghania s'était engagée dès son jeune âge dans le militantisme syndicaliste au lycée à Béjaïa avant de poursuivre son engagement à l'Université d'Alger où elle avait préparé une licence de français, parallèlement à son combat politique manifeste et clandestin pour les droits des femmes, des ouvriers, pour les libertés fondamentales et le pluralisme. Membre fondatrice du SNEAD et militante au sein du PST, de l'Association pour l'émancipation de la femme, Ghania n'avait ménagé aucun effort pour aider son prochain et soutenir ceux qui étaient dans le besoin. C'est au moment où bon nombre de gens fuyaient le pays pour échapper à la déferlante terroriste que Ghania a choisi le métier de journaliste. C'est ainsi qu'elle a intégré en 1991 la radio nationale et tonné de sa voix sur les ondes de la Chaîne III. Journaliste de talent, Ghania a eu le courage de ses idées et de ses convictions qu'elle défendait jusqu'à son dernier jour. Elle rejoint ainsi la légion des braves qui ont pris à leur compte l'épitaphe des vivants que Tahar Djaout lança quelques mois avant son assassinat : «Si tu parles tu meurs, si tu te tais tu meurs, alors parle et meurs.» A. G.