De notre correspondant à Oran Mohamed Ouanezar évoquer la protection et la préservation du patrimoine historique d'Oran revient à incriminer les différents responsables qui ont eu à gérer les destinées de la capitale de l'Ouest, qu'ils soient au sein du secteur ou à la tête de la wilaya. Une responsabilité à laquelle le citoyen s'est longuement soustrait. Aboutissement d'un long parcours et d'une prise de conscience précoce, l'action d'associations locales reste un indicateur fiable du degré d'intérêt à la chose par nos responsables. Il y a quelques jours, une randonnée pédestre a réuni de jeunes Oranais, des visiteurs d'autres wilayas et des étrangers sur le flanc du Murdjajou (mont de l'Aïdour) qui abrite la fameuse citadelle Santa Cruz. Une belle virée qui a suscité la curiosité locale et ouvert la porte à une véritable perspective pour les sites du vieil Oran dans le quartier de Sidi El Houari. Ces sites, qui étaient jusqu'à il y a quelque temps, à l'abandon et en proie au vandalisme et aux actes de sabotage, retrouvent peu à peu vie et font l'objet d'un intérêt certain. Et ce n'est sûrement pas à la conscience et l'esprit d'initiative des responsables locaux de la culture qui se sont succédé à la direction d'Oran qu'on doit cette embellie relative du patrimoine. S'il est vrai que le ministère de la Culture a accordé plus d'intérêt à la préservation du patrimoine matériel et immatériel depuis l'arrivée de Khalida Toumi, tous les directeurs n'avancent pas à la même cadence, faut-il le signaler. D'où l'action citoyenne et celle associative développées tout au long de ces dernières années et qui ont permis de limiter les dégâts et de préserver un tant soit peu ce qui peut l'être. Mais les actions de proximité avec le patrimoine historique initiées par les associations ont abouti à la certitude que le patrimoine ne peut être valorisé et réhabilité que s'il est employé dans une logique de rentabilité et d'industrie. L'ancien consul général d'Espagne à Oran avait proposé l'idée de «rentabiliser le fort de Santa Cruz à travers la mise en place de programmes attractifs qui ne soient pas en contradiction avec l'esprit du site et sa valeur historique». Etant en retrait de la ville, isolé sur les hauteurs et sans protection aucune, le site de Santa Cruz gagnerait à abriter des activités en concordance avec l'esprit du site. Dans ce cadre, il faut également citer les propositions du mouvement associatif, notamment Bel Horizon qui appelle à implanter un musée du vieil Oran ou encore à ouvrir la ville sur la mer. Une revendication qui entre dans la perspective d'un tourisme patrimonial. Doté d'un potentiel marin extraordinaire, Oran ne profite pas de cette aubaine naturelle. L'association propose également la restitution d'espaces de jadis, légendaires et emblématiques, notamment la place d'Armes, le Rosalcazar et l'hôtel Châteauneuf. L'ancienne Scalera, telle qu'elle a subsisté à travers l'histoire de la ville devrait également être réinventée, selon l'association. En effet, la ville ne connaîtra une réelle métamorphose que si les sites qui ont fait sa gloire sont réhabilités et revalorisés. Le site de la Scalera abrite en contrebas l'un des endroits les plus attractifs de la wilaya : la Pêcherie. La revalorisation de ces sites et monuments déterminera l'avenir du vieil Oran. D'où la nécessité de revivifier les bains de la reine «Hammam Dada Youb», de revaloriser et de protéger le bois des Planteurs, l'île Plane, les îles Habibas, Madegh, Aïn Franine et ses sources naturelles, etc. Sinon, les sites du vieil Oran connaîtront, à coup sûr, le même sort que celui du mausolée de Sidi M'hamed Benaouda, qui surplombait les falaises du port et régnait en maître sur la balade de l'avenue du pont Zabana. Et dire que le mausolée, construit en 1768 par les rebelles algériens qui assiégeaient les Espagnols retranchés dans le fort de Sainte-Thérèse (Châteauneuf), est le témoin des assauts d'alors.