De notre correspondant à Bouira Nacer Haniche A quelques jours de la rentrée scolaire, c'est déjà la déprime chez les parents qui ont plusieurs enfants scolarisés. Ils doivent, après un été plein d'autres dépenses et devant la baisse de leur pouvoir d'achat, faire face à la cherté des fournitures scolaires et des vêtements. Alors que les citoyens s'apprêtent à mettre de côté les tracasseries, la frénésie boulimique de la table du f'tour et les flambées de prix des produits alimentaires au niveau des marchés vécues au cours du mois de Ramadhan, la rentrée scolaire et la fête de l'Aïd s'invitent pour provoquer une autre saignée dans les économies, ô combien maigres des ménages. Ainsi, les signes de pauvreté ne cessent de se multiplier et de crever les yeux de ceux qui, inconsciemment ou non, voudraient oublier ou feindre d'oublier l'existence de franges entières de la population qui n'ont pas accès aux moyens les plus modestes de la vie moderne. Si, durant la période du mois sacré, l'écart entre les pauvres et les riches était plus visible chez les marchands de fruits et légumes, les bouchers et autres magasins de denrées alimentaires, pour cette rentrée le quotidien des gens n'est pas dénué de symptômes de déchéance humaine et de misère sociale. Ces derniers jours, au vu et au su des autorités et des services de contrôle de la qualité et de la répression des fraudes chargés de mettre fin au commerce informel, il est aisé de constater que toute la noria de vendeurs à la sauvette qui étaient spécialisés dans la vente des produits alimentaires s'est transformée et s'intéresse à la marchandise qui correspond à la circonstance. Ainsi, après le f'tour, les rues, les trottoirs et les marchés de la ville de Bouira offrent un autre décor avec des étals chargés de vêtements, d'articles scolaires, de jouets et autres produits importés qui feront la joie des enfants à l'occasion de l'Aïd. Au même moment, les vêtements et la lingerie inondent les magasins et les marchés locaux sous les labels chinois, syrien ou turc. Dans la rue qui mène du pont Sayah au siège de la wilaya, la concentration des vendeurs a rendu la circulation difficile aux piétons et aux automobilistes. Les propriétaires des magasins n'arrivent pas à se débarrasser de ces vendeurs qui squattent les trottoirs pour exposer leurs marchandises aux familles pressées de faire leurs emplettes dans la perspective de la rentrée scolaire. Parmi ces commerces du chef-lieu de la wilaya et des villes périphériques, il y a ceux qui proposent des articles locaux, mais la majorité s'est branchée sur des effets vestimentaires et autres produits textiles importés et même la friperie acquise auprès d'importateurs installés dans les grandes villes comme Alger, Oran ou Annaba. Comme à leur habitude, les commerçants profitent de cette aubaine pour essayer de tirer le maximum de profits. Sachant pertinemment que les enfants sont les seuls à se faire habiller en pareilles circonstances, les vendeurs, spécialisés dans l'habillement pour enfants, augmentent les prix. Ainsi, à chaque occasion festive et depuis le début des années 1990, on constate que le phénomène d'achat de fripes connaît une courbe ascendante, attestant que la rentabilité des vendeurs de fripes ne cesse de croître et que le pouvoir d'achat des ménages ne cesse de décroître malgré les augmentations de salaires effectuées dernièrement. Par ailleurs, ces derniers jours, on a remarqué que la gamme des articles de friperie proposés à la vente s'est diversifiée si bien qu'on trouve exposés des rideaux, des sous-vêtements et des chaussures. Les parents et les acheteurs abordent les étalages sans grand complexe ; la pratique est, il faut le dire, entrée dans les mœurs depuis que parmi la classe moyenne, formée auparavant de fonctionnaires et de métiers libéraux, a disparu.