De notre correspondant à Bouira Nacer Haniche L'identité et le cachet historique d'une ville se reconnaissent à travers ses sites historiques, son architecture, sa cuisine, ses traditions vestimentaires et ses coutumes, ainsi que les activités socioculturelles de ses habitants. Cependant, de ces aspects ne subsistent que des rudiments pour distinguer la ville de Bouira des autres localités de la wilaya ou même du pays. L'extension urbanistique et les segments urbains intervenus ces dernières années ont été effectués au détriment du souci de la sauvegarde du patrimoine identitaire de certaines agglomérations. En effet, au chef-lieu de wilaya de Bouira, qui connaît depuis 2008 d'éternels travaux de réfection de voirie et de réaménagement de ruelles et d'espaces publics, ces opérations ont été accompagnées de démolitions et de reconstructions au niveau de l'ancienne ville, ce qui est considéré par certains comme un massacre de l'ancien bâti qui porte la mémoire et le passé historique de leur cité. Au même moment, la seule association de la protection du patrimoine, qui active localement, est restée silencieuse devant l'avancée des engins et du béton. Du côté des responsables de la culture, c'est également l'expectative du fait que les décisions de démolition et de rénovation sont prises par la wilaya. En effet, s'inscrivant dans le cadre des projets d'amélioration urbaine, ces dernières années, les différentes localités de la wilaya connaissent l'extension de leur tissu urbanistique soit par des réalisations de privés ou des pouvoirs publics. Cet essor se caractérise notamment par de nouvelles réalisations architecturales censées abriter des administrations ou des équipements par lesquels les responsables entendent répondre aux préoccupations de la population. Mais, souvent, le citoyen manquant de civisme défigure le paysage de la ville et les autorités, acculées, de leur côté, par les doléances des citoyens construisent sans se soucier du cachet culturel ni de l'aspect architectural qui caractérisent la région. Alors que l'ancien bâti de Bouira-ville, Sour El Ghozlane, Lakhdaria, Aïn Bessam et autres agglomérations est menacé par l'effondrement, les projets lancés dans le cadre de l'amélioration du cadre de vie des citoyens et du paysage urbain, laissent conclure que nos responsables n'ont pas une politique adéquate dans le domaine. D'autre part, l'impact sur le paysage est négligé par les maîtres d'ouvrage et les concepteurs tenus par les délais de réalisation portés sur les cahiers des charges. Ce qui fait de nos villes, déjà en souffrance d'urbanité, des amas d'immeubles désorganisés offrant un paysage banal et impossible à vivre pour le citoyen. En l'absence de spécialistes, notamment des décorateurs et d'architectes paysagistes, les pouvoirs publics qui ont conçu plusieurs édifices en forteresses ont raté l'occasion d'harmoniser les infrastructures avec le cadre de vie de la population. Des urbanistes indiquent que le rôle du paysagiste en urbanisme consiste à réintégrer la ville dans son histoire et sa géographie, car la ville n'est pas seulement l'ensemble de flux, de masse et de réseaux, mais une évolution des espaces dans le temps. Et ce n'est que quelques années après qu'on s'aperçoit du manque d'embellissement dans tel quartier ou placette de la ville. Sur le plan décoration urbaine (statue, rond-point, jet d'eau, fontaine, sculptures…), les différentes localités de la wilaya accusent un retard, même si quelques ouvrages réalisés ces dernières années ne reflètent aucun rapprochement avec le patrimoine culturel local. Sauf peut-être quand il s'agit de réaliser des stèles en hommage à des martyrs de la révolution. Selon des spécialistes, ces ouvrages nécessitent des mains de maître, car ils sont appelés à devenir des monuments qui véhiculeront la mémoire des lieux, leur histoire et leur topographie. Ces décorations urbaines doivent aussi être en adéquation avec l'âme du village ou de la ville où elles sont implantées.