De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Cela devient redondant : le centre anticancer de Constantine est débordé et son substitut en chantier se dessine à pas de tortue. Ouvert depuis 1998, il accueille les malades des dix-sept wilayas de l'Est algérien. Quand un appareil tombe en panne, c'est tout le calendrier qui est chamboulé avec évidemment des retombées «néfastes» sur le suivi des patients. A cela s'ajoutent des pénuries en médicaments qui perturbent la thérapie. Du moins pour ce dernier cas, les avis sont divisés : la direction appelle un consensus des protocoles, mais quelques médecins revendiquent «des molécules mères» selon les gestionnaires du CHU.Il est évident que la radiothérapie et à un degré moindre la chimiothérapie constituent le talon d'Achille du CHU. Ce ne sont pas les compétences qui font défaut. Ces dernières voient tous leurs efforts anéantis par la faiblesse des moyens, dont dispose la structure au bord de l'asphyxie, et par le rush incessant des malades en provenance des dix-sept wilayas de l'Est et du Sud-Est. C'est ce que relèvent la corporation médicale et les proches des patients à chaque fois que la problématique relative à la rareté du médicament et à l'exiguïté des espaces de soins est évoquée ou bute sur un autre concept, celui du diagnostic précoce chez les malades. Il importe donc d'inverser le processus pour se rendre compte de la nécessité de la prévention pour minimiser, voire entamer une éventuelle prise en charge de l'état de santé in situ. A ce titre, nous dira le directeur du CHU, en l'occurrence le docteur Zermane, «la prévention et la sensibilisation sont un tandem indissociable. Cela permet d'éviter aux cancéreux d'arriver à des stades finaux». Sans occulter les pénuries «fréquentes» en médicaments et autres drogues qui sanctionnent le CAC, notre interlocuteur analyse la situation autrement : «On devrait uniformiser le consensus des protocoles.» Et d'ajouter : «Autrement dit, il faut s'adapter à toutes les situations quand il s'agit de rupture ou de manque en médicaments. Effectivement, le CHU enregistre parfois des insuffisances d'une ou de deux drogues. Cela soulève à chaque fois le tollé aussi bien chez le malade que chez les médecins. Toutefois, 90% du traitement est disponible. C'est pour dire qu'on pourrait bien recourir à des molécules génériques pour ne pas interrompre la thérapie du patient.» Dans un autre registre, le directeur fera part de la nomenclature arrêtée par le ministère qui récuse des «molécules» encore à l'essai, donc ne pouvant être prescrites. Pour mieux répartir les drogues au niveau du CAC, la direction a chargé le professeur en oncologie Filali d'établir les besoins du service en présentant des fiches navettes adressées à la pharmacie centrale du CHU, qui distribue les médicaments demandés. L'enceinte est pourvue une fois par mois, révèle la responsable Mme K. Chellali «En cas d'une mande pressante des reliquats sont fournis», renchérit-elle. En ce qui concerne les nouvelles molécules, on apprend qu'elles demeurent à l'état expérimental et l'Algérie ne s'aventurera pas à les importer de sitôt. Les marchés en équipements médicaux doivent-ils «griller» les chaînes bureaucratiques ? En matière de santé et surtout dans certaines pathologies, cette appréciation serait tolérable sous réserve de contrôle. L'accélérateur linéaire promis par le ministère de la Santé au profit du centre anticancéreux du CHUtarde à se concrétiser arrivé. La promesse a pourtant été faite, il y a plusieurs mois, par l'ex-ministre du secteur, M. Barkat, en visite à Constantine. «Étant donné que la structure hospitalière prend en charge les dix-sept wilayas de l'Est en matière de radiothérapie, un appareil supplémentaire, et peut-être deux sont indispensables pour réguler le flux des malades.» C'est en substance l'appréciation de la tutelle qui visait par là aussi une sorte de rénovation du «parc» en mettant fin aux traditionnels tireurs à cobalt, dont la capacité est largement en deçà des performances requises. Il n'en fut rien. Aux dernières nouvelles, les procédures administratives relatives au marché ont différé l'échéance. Un retard qui se répercute sur les termes de la radiothérapie dispensée aux patients. Cependant, une source proche du CHU atteste que «l'appareil est acquis, il faut juste du temps pour le rendre opérationnel». Désormais, les regards demeurent braqués sur le nouvel hôpital de Didouche, rétrocédé au secteur public après les passations de consignes entre la partie civile (ministère de la Santé et de la Réforme hospitalière) et les responsables militaires. M. Ould Abbes, qui présidait cette rétrocession, a promis à l'occasion une salle équipée en toutes sortes de radiologie, notamment celle destinée aux cancéreux dès lors que le budget existe et se trouve dans les coffres des pouvoirs publics. Soit deux alternatives profitant pleinement à cette catégorie, mais qui restent en apparence préliminaires avant de soulager les cancéreux. Il y a urgence en la demeure car les malades ne savent plus où donner de la tête et, malheureusement, la pathologie ne peut pas se mettre en mode de veille. Elle évolue, et vite.