Photo : S. Zoheir Par Ziad Abdelhadi Des mesures d'incitation à la production de lait cru ont été mises en place par le ministère de l'Agriculture et du Développement rural depuis plus d'une décennie. Cela a certes donné des résultats palpables sur le terrain puisque la production a quasiment doublé pour passer de 1 milliard de litres/an à 2 milliards. Cet accroissement de la production de lait cru est surtout le fait d'une augmentation des effectifs des vaches laitières et non des rendements des exploitations. Selon des observateurs proches du dossier, cette progression des effectifs, notamment à partir de 1981, est surtout due à l'importation par l'Etat de vaches laitières à hauts rendements. «La croissance interne du troupeau n'ayant que très faiblement contribué à cette croissance», nous ont expliqué des éleveurs professionnels. Et de nous faire savoir «que le caractère peu productif du cheptel laitier est dû au fait que les élevages sont essentiellement extensifs».Cela dit, la reprise en main de la filière a permis de corriger les insuffisances décelées. Si la production avait repris, la collecte demeurait le maillon faible de la chaîne et du coup le ministère a opté pour son renforcement en mettant en place une prime d'encouragement à la collecte. La mesure a donné des résultats et bon nombre de laiteries ont conclu des contrats d'approvisionnement en lait cru avec des éleveurs. Les transformateurs sont aussi bénéficiaires et à chaque litre de lait cru transformé, ils reçoivent une prime de 7 dinars. La mesure a d'ailleurs fini par convaincre plus d'un. L'activité de collecteur-livreur s'est vite développée au point où certains patrons de laiteries se sont mis de la partie. Et pour cause, chaque segment de la chaîne (la collecte, la livraison et la transformation) était fort bien rémunéré par les primes accordées. Mais en dépit de ces mesures incitatives, les laiteries ont cependant continué à mener leur activité en donnant la priorité à la poudre de lait laissant ainsi des milliers d'hectolitres de lait cru sans intégration dans le processus de production. Ce qui n'a pas manqué de soulever le mécontentement des responsables du secteur qui sont allés jusqu'à prendre des décisions visant à obliger les laiteries à intégrer de plus en plus le lait cru dans leur activité. On se rappelle, en effet, que le MADR avait décidé, il y a deux ans, la mise en place d'un quota d'approvisionnement en poudre de lait à partir de l'Office de régulation du marché de la poudre de lait (ONIL) en fonction du prorata d'intégration de lait cru. Mais en définitive, ce dispositif n'a pas eu l'effet escompté puisque les laiteries ont continué à s'accommoder des quotas établis non sans tenter de convaincre l'ONIL de revoir à la hausse leur quote-part en avançant des prétextes fallacieux aux yeux du ministre du Commerce. Dès lors où ce dispositif de quotas n'a pas changé grand-chose chez les laiteries, préférant toujours la poudre de lait, le ministère de l'Agriculture vient de décider d'agir autrement, et de manière plus subtile, pour tenter de changer la donne. Il vient, en effet, d'annoncer la mise en place d'une nouvelle prime. Une surprime pour les transformateurs de lait local Le but recherché à travers cette surprime est avant tout d'encourager les laiteries qui utilisent exclusivement le lait cru issu des élevages nationaux. C'est en tout cas ce qu'a expliqué le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Rachid Benaïssa, lors de son dernier passage sur les ondes de la Chaîne III de la radio nationale. Pour l'heure, elles sont seulement une quinzaine de laiteries à bénéficier d'une telle surprime sur un total de 120 laiteries. Ce qui démontre que le gros de la troupe use «ou abuse» de la poudre de lait sans prendre en considération tous les efforts déployés par l'Etat pour réduire notre facture d'importation en poudre de lait. Toutefois, «le nouveau dispositif va être élargi à une centaine d'autres unités», a annoncé le ministre. Benaïssa a, par la même occasion, lancé un avertissement aux laiteries qui ne transforment que le lait en poudre. «Elles seront probablement exclues des mesures d'incitation», a signalé le premier responsable du secteur. Selon lui, les laiteries qui ne transforment que le lait en poudre seront probablement exclues des mesures d'incitation. «Nous essayons de renforcer le rythme de la collecte du lait frais. Nous sommes en négociation au sein du conseil interprofessionnel pour arriver à un encadrement qui favoriserait toutes les laiteries qui utilisent le lait cru. Nous ferons pression aussi sur les laiteries qui transforment le lait en poudre pour utiliser le lait frais pour encourager la production nationale», a-t-il indiqué.Rappelons également que les dernières mesures prises par le ministère à l'encontre des transformateurs récalcitrants reflètent tout au moins cet impératif de réduire au plus vite nos importations en poudre de lait. Cela est d'autant plus faisable quand toutes les conditions de production sont réunies et que l'industrie laitière s'inscrit dans cette logique.