La conférence ordinaire de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) tenue à la mi-octobre n'a pas changé grand-chose aux cours du pétrole, les marchés continuant à alterner des hausses et des baisses. Mais, globalement, la fourchette des cours demeure raisonnable aux yeux des membres de l'organisation viennoise qui ne compte pas toucher à ses quotas dans l'immédiat. Les cours du brut se repliaient vendredi dernier, par exemple, dans les échanges électroniques en Asie, en raison d'une remontée du dollar face à l'euro. Le baril de «light sweet crude» pour livraison en décembre perdait 22 cents à 81,96 dollars. Celui du brent de la mer du Nord à échéance décembre reculait de 16 cents à 83,43 dollars. La prise que l'OPEP a sur les marchés semble avoir laissé place, momentanément, à d'autres facteurs, haussiers ou baissiers, la fluctuation du dollar en tête. Le cours du brut perdait un peu de terrain, dans le sillage de la légère appréciation du dollar. Le dollar américain s'est renforcé quelque peu face à l'euro, et les cours du pétrole suivent. C'est une conséquence logique, lorsque le dollar monte, le pétrole, libellé en dollars, devient moins attractif pour les investisseurs détenant d'autres devises et qui s'intéressent aux matières premières. Quand le dollar se déprécie, cela se traduit automatiquement par une diminution des prix du brut. Un ordre de grandeur pour illustrer la parité : l'euro valait 1,39 dollar vendredi dernier en Asie, contre 1,3929 jeudi aux Etats-Unis. Jeudi, sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de «light sweet crude» pour livraison en décembre a terminé à 82,18 dollars, en hausse de 24 cents par rapport à la veille. A Londres, sur l'IntercontinentalExchange, le baril de brent de la mer du Nord à échéance identique a gagné 36 cents à 83,59 dollars. C'est un dollar de plus par rapport aux séances de vendredi. Autre tendance baissière enregistrée dans la journée de mercredi, où les prix s'étaient repliés, après un rapport mitigé sur l'état des stocks aux Etats-Unis et sur fond de raffermissement de la monnaie américaine. Sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de «light sweet crude» pour livraison en décembre a terminé à 81,94 dollars, en repli de 61 cents par rapport au mardi 26 octobre. A Londres, sur l'IntercontinentalExchange, le baril de brent de la mer du Nord à échéance décembre a perdu 43 cents à 83,23 dollars. Les spécialistes relèvent que le marché a évolué dans «le rouge» tout au long de la séance mais a limité ses pertes à l'approche de la clôture, soutenu par la hausse des prix de l'essence. Le rapport hebdomadaire sur les stocks publiés mercredi dernier par le département de l'Energie a en effet envoyé des signaux contradictoires. Selon le DoE, les stocks de brut ont progressé de 5 millions de barils lors de la semaine achevée le 22 octobre, un bond spectaculaire par rapport à la hausse de 700 000 barils sur laquelle tablaient les analystes interrogés par l'agence Dow Jones Newswires. Toutefois, cela avait été «anticipé» par le marché», a estimé Helen Henton, de Standard Chartered Bank, cité par des médias. Ce bond a même été «éclipsé» par une chute surprise des réserves d'essence et un recul de celles de produits distillés, qui incluent le gazole et le fioul de chauffage, a ajouté l'analyste. Les stocks d'essence ont chuté de 4,4 millions de barils, contre une diminution de 200 000 barils attendue, tandis que ceux de distillats ont reculé de 1,6 million de barils (contre une prévision de 1 million). Cette tendance fluctuante devrait-elle être temporaire ? En tout cas, l'OPEP semble optimiste et ses membres pensent que la production pétrolière ne fléchirait pas, que la demande augmenterait. La vision de l'organisation est confortée par des experts occidentaux. Malgré le fait que certains des principaux gisements mondiaux (la production des champs de la mer du Nord et du Mexique diminue de 150 000 à 200 000 b/j chaque année) commencent à décliner, il y aura toujours suffisamment de pétrole sur les marchés et pour longtemps, la production des pays non affiliés à l'OPEP devant augmenter d'environ 300 000 b/j en 2011, selon les projections de l'OPEP. Cette croissance de la production concerne essentiellement de nouveaux gisements dans les pays en développement, bénéficiant souvent d'investissements et de financements chinois et autres multinationales à la recherche de pétrole bon marché. La Chine importe déjà d'importantes quantités de pétrole en provenance de l'Angola, du Soudan et de la Libye, et devrait, au cours des prochaines années, se fournir auprès d'autres producteurs africains tels que le Gabon, le Nigeria, le Niger et le Cameroun, précise un expert de Nataxis cité par des agences de presse. Au Ghana, par exemple, le nouveau champ de Jubilee, qui pourrait contenir 1,8 milliard de barils et devrait produire jusqu'à 240 000 b/j à l'horizon 2014-2015, devrait entrer en production en décembre prochain.L'OPEP avance par ailleurs que la hausse de la production de GNL (+400 000 b/j en 2011) viendra s'ajouter à la hausse de la production de pétrole des pays non membres. En conséquence, en 2011, la demande journalière adressée à l'OPEP pourrait être inférieure à son niveau de production actuel. Sur le long terme, plusieurs projets majeurs devraient contribuer à la hausse de la production mondiale. D'abord en Irak, où les compagnies pétrolières internationales se sont engagées à accroître la production des principaux gisements irakiens et à la porter de 2,3 millions de barils/j actuellement à plus de 12,5 millions de barils/j au cours des deux prochaines décennies. Si le contexte politique et le manque d'infrastructures rendent cet objectif difficile à atteindre, il est toutefois réaliste de tabler sur une production de 5 millions de barils/j minimum. En tout cas, la situation sécuritaire qui prévaut aujourd'hui dan le pays n'a pas empêché de grosses pointures connues et reconnues dans l'industrie pétrolière et gazière de soumissionner pour des projets estimés en milliards de dollars. Au Brésil, le développement de champs pré-salifères off-shore devrait permettre de porter la production de 2 millions de barils/j actuellement à plus de 4 millions de barils/j au cours de la prochaine décennie. Au Kazakhstan, le gisement de Kashagan a connu de nombreuses difficultés depuis sa découverte en 2000, mais, selon certaines informations, la production pourrait commencer en 2012, et sans doute atteindre les 1,5 million de barils/j sur une période de 10 ans. Au-delà de ces projets conventionnels, d'autres projets visent à développer la production de pétrole à partir du gisement de schistes bitumineux. Dans le Nord Dakota, la production extraite du gisement bitumineux de Bakken a atteint environ 200 000 barils/j, illustrant le large potentiel d'utilisation des techniques de fracture horizontale dans des gisements contenant à la fois du pétrole et du gaz naturel. Ces projets ne représentent qu'une partie de la hausse attendue de la production au cours de la prochaine décennie. L'OPEP dispose actuellement d'environ 6 millions de barils/j de capacités inutilisées, les pays producteurs investissent largement dans le développement de nouveaux champs pétrolifères, alors que la demande des pays développés devrait être globalement stable au cours des prochaines années. Y. S.