En raison de sa grandeur, la révolution algérienne a pu attirer la sympathie et l'adhésion de nombreux Etats, peuples et personnalités étrangers. C'est le cas, entre autres, de l'ancien président de l'entreprise italienne d'hydrocarbures ENI, Enrico Mattei, dont le rôle actif en faveur de l'indépendance algérienne, à la fin des années 50 et au début des années 60, fera l'objet d'un colloque international à Alger. Prévue le 7 décembre prochain à l'hôtel El Aurassi, la rencontre est placée sous le haut patronage du président Abdelaziz Bouteflika et est organisée par l'ambassade d'Italie en Algérie et l'Institut culturel italien, avec la collaboration de la Direction générale des archives nationales d'Algérie, l'ENI et l'Office national de la culture et de l'information (ONCI). Il s'agira «de recueillir les témoignages de personnalités italiennes et algériennes ayant connu ou vécu ce moment fort des relations entre l'Italie et l'Algérie. L'apport de Mattei à la cause algérienne fut politique, diplomatique et technologique, sans oublier ses efforts pour faire allier également la presse internationale, de même que pour assurer le refuge aux militants de l'indépendance», indique une note introductive de l'ambassade d'Italie. Hier, au siège de cette dernière, Son Excellence l'ambassadeur Giampaolo Cantini a déclaré, lors d'une conférence de presse, que le prochain colloque servira surtout à faire connaître des aspects méconnus de l'apport important de cette personnalité connue pour son attachement aux valeurs démocratiques et pour ses idées anti-colonialistes et anti-impérialistes. Mattei était si engagé en faveur de l'Algérie qu'il n'a pas manqué de faire l'objet de menaces de l'OAS, apprend-on aussi sur le personnage qualifié, par ailleurs, d'homme de paix. «Nous souhaitons contribuer à l'écriture d'une page importante de l'histoire de votre pays… L'Italie, qui a connu trois guerres d'indépendance et une quatrième avec la Première Guerre mondiale, ne pouvait rester indifférente aux causes d'indépendance de par le monde», dira ce dernier avant de rappeler que les relations entre les deux pays remontent à la période avant l'indépendance en 1962. Lors de la guerre, a-t-il ajouté, l'Italie a soutenu la cause nationale à travers un réseau important d'appui, citant au passage celui du maire de Florence de l'époque et par ailleurs ami de Mattei. De même que la contribution de la plus importante maison d'édition d'Italie dans la traduction des documents liés à la résistance algérienne face au colonialisme. L'ambassadeur évoquera, en outre, l'homme visionnaire dans le sens où il avait plaidé pour une notion «totalement nouvelle à l'époque» en parlant de «souveraineté de pays producteurs de pétrole». La conférence de presse a été précédée de la projection d'un film retraçant le combat de l'ex-dirigeant de l'ENI pour imposer son pays dans le très fermé consortium mondial pétrolier qu'il nommait ironiquement «les sept sœurs». Son engagement s'est illustré à travers les contrats que sa compagnie signait avec des pays producteurs de pétrole issus du tiers-monde, tels que l'Algérie, l'Iran, l'Egypte… «Mattei plaidait pour une collaboration paritaire entre Etats producteurs et consommateurs», dira le commentateur du film qui rend hommage à celui dont, fait peu connu, le gazoduc Transmed porte le nom. Pour revenir à la rencontre de mardi, elle se déroulera en deux sessions et abordera les aspects suivants : «L'Italie et la cause algérienne» ; «Le FLN et le réseau de solidarité en Europe occidentale » ; «L'Italie et la question algérienne : le gouvernement, les partis et les forces sociales» ; «La stratégie de Mattei en Afrique du Nord et le soutien à la cause nationale algérienne» ; «Les ressources du Sahara algérien dans les négociations d'Evian». Chaque session sera introduite par des interventions de personnalités italiennes telles que M. Mario Pirani, journaliste et ancien collaborateur de Mattei dans ses activités en Afrique du Nord, Mme Laura Nardi, responsable des relations culturelles de l'ENI, Mme Bruna Bagnato, professeur des relations internationales à l'Université de Florence, et des personnalités et témoins algériens tels que M. Mohammed Kelladi et M. Ali Cherif Deroua. Une exposition est, par ailleurs, prévue par la Direction générale des archives nationales d'Algérie et les Archives historiques de l'ENI sur les rapports entre l'Italie et l'Algérie et sur Enrico Mattei précédera le colloque. Le colloque sera suivi, le même jour, par la projection à la salle El Mouggar, dès 19 heures, du film L'Affaire Mattei de Francesco Rosi (1972), récipiendaire de la Palme d'or à Cannes. M. C.