Un an après l'échec lamentable du sommet sur le climat de Copenhague (Danemark), la conférence des Nations unies sur le réchauffement climatique de Cancun, au Mexique, qui s'est tenue du 29 novembre au 10 décembre, n'est pas parvenue à un nouvel accord de protection du climat. Elle n'a pas également réussi à prendre des décisions contraignantes pour les pays développés, premiers responsables du changement climatique, en particulier les Etats-Unis, principal pollueur de la planète, qui, rappelons-le, n'ont pas ratifié le protocole de Kyoto. Pis, la conférence de Cancun s'est soldée par un accord timide et temporaire de faible portée : création d'un fonds vert destiné à aider les pays pauvres. Ce fonds est mis en place pour gérer l'argent promis il y a un an à Copenhague, c'est-à-dire 30 milliards de dollars d'ici à 2012 et 100 milliards par an à partir de 2020. Création d'un fonds vert du climat «Le Fonds climat sera opérationnel l'année prochaine, à Durban, Afrique du Sud (prochaine conférence de l'Onu sur le climat), et mis en œuvre par un comité où les pays en développement seront majoritaires», indique-t-on. Les pays riches se sont clairement «engagés» à verser de l'argent aux pays en développement. Cet accord a été adopté à la quasi-unanimité des 192 pays présents. Seule la Bolivie s'est prononcée contre. C'est la Banque mondiale qui servira d'administrateur intérimaire durant trois ans. Toutefois, il y a une absence de contraintes notamment envers les pays émetteurs de gaz à effet de serre. Les rapports produits par les grands pays émergents, comme la Chine ou l'Inde, sur leur émission de GES seront soumis à des consultations et analyses internationales (ICA) «non intrusives», «non punitives», et «dans le respect de la souveraineté nationale». L'Afrique, responsable de moins de 5% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, subit de plein fouet les effets dévastateurs du changement climatique. Appuyée par l'Espagne, l'Algérie, représentée par le ministre de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement, a été désignée lors du rendez-vous de Cancun comme «médiateur pour faciliter le rapprochement entre les différentes parties du monde». Cherif Rahmani a mené à cette occasion des concertations avec les représentants de l'Union européenne (UE), du Groupe des 77, de la Chine, des Etats-Unis, de l'Australie, du Japon, de la Nouvelle-Zélande et du groupe Afrique pour œuvrer à faciliter le rapprochement entre les différentes parties du monde. Le sommet de Cancun a été un autre fiasco des Nations unies ? C'est du moins ce que font remarquer la plupart des observateurs qui constatent que les négociations pour un éventuel accord mondial de protection du climat piétinent. L'après-Kyoto reporté à Durban «L'accord de Cancun fournit une plateforme pour l'abandon du protocole de Kyoto de réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui arrive à expiration en 2012, le remplaçant par un faible système de promesses et de révision hérité de l'accord de Copenhague, qui conduirait à un réchauffement climatique dévastateur de 5 degrés Celsius», déplorent certains observateurs. En effet, la question sensible de l'avenir du protocole de Kyoto reste totalement posée. Il est le seul protocole juridiquement contraignant sur le climat existant à ce jour. L'accord de Cancun pour la création d'un fonds vert reste la seule mesure prise par près de 200 pays rassemblés dans cette station balnéaire pendant plus de 12 jours. En revanche, la question de la nature de l'engagement de chaque pays en vue de réduire ou de limiter les émissions de gaz à effet de serre (GES) a été laissée de côté. Le seul traité légalement contraignant est le protocole de Kyoto, signé en 1997, qui fixe des objectifs chiffrés en matière de réduction d'émissions de GES aux pays industrialisés. Sa première période d'engagement s'achève fin 2012, et l'incertitude règne quant à sa prolongation. Il ne couvre plus que 30% des émissions totales de GES, car il ne concerne pas les Etats-Unis - qui ne l'ont pas ratifié - ni les grands pays émergents comme la Chine, devenue depuis quelques années le premier pollueur au monde. Le ministre indien de l'Environnement Jairam Ramesh a, pour la première fois, évoqué à Cancun la possibilité que son pays signe un traité juridiquement contraignant sur le climat, tout en soulignant que ce temps n'était pas encore venu. L'Inde avait jusqu'ici, comme la Chine, toujours rejeté l'idée de signer un tel accord, mettant en avant la responsabilité historique des pays développés dans l'accumulation de GES dans l'atmosphère.Face à l'envolée annoncée du thermomètre mondial, qui pourrait grimper jusqu'à 4°C, voire 6°C d'ici à la fin du siècle, la réponse internationale reste peu convaincante. Les engagements de réduire les émissions de gaz à effet de serre sont insuffisants. En fait, Cancun n'a permis aucune percée sur ce point. Et sur la question de l'avenir du protocole de Kyoto, qui oblige les pays développés, Etats-Unis mis à part, à réduire leurs émissions polluantes, la conférence n'a enregistré aucune avancée concrète.Les blocages persistent. L'Union européenne s'est inquiétée des nouvelles contraintes imposées à l'UE pour réduire les gaz à effet de serre et des difficultés pour les mettre en œuvre. Des divergences sont apparues au sein de l'Union européenne, encore très divisée sur les actions à mettre en œuvre. L'accord de Cancun prévoit la création d'un fonds vert pour aider les pays en développement et lance un mécanisme pour lutter contre la déforestation mais des interrogations sur le fonctionnement de ce fonds subsistent. Cancun a certes prévu un fonds vert, mais aucune précision n'a été fournie sur l'origine des financements. «D'où viendra l'argent.» «Nous avons proposé une taxe sur les transactions financières et ceux qui sont contre proposent d'autres solutions», a argumenté Joe Leinen, député européen. La question du financement a soulevé les passions dans les rangs des eurosceptiques britanniques, rétifs à l'idée de «donner de l'argent aux dictateurs». La commissaire au Climat Connie Hedegaard, qui a négocié l'accord de Cancun, s'est bien gardée de prendre position dans ce débat et attend les prises de position des gouvernements, dont les ministres de l'Environnement se réunissent le 20 décembre à Bruxelles. Elle a toutefois souligné que la suite des négociations internationales serait «longue et difficile» jusqu'à la prochaine réunion prévue fin 2011 à Durban en Afrique du Sud. La France veut que «tous les pays» prennent des «engagements contraignants» en matière de réduction d'émissions de CO2 à l'occasion du prochain grand rendez-vous sur le climat, a indiqué dernièrement la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet. Enfin, le débat phare, à savoir l'après- Kyoto est reporté à 2011 au sommet de Durban en Afrique du Sud. Le débat demeure entier : convaincre les Etats de freiner leurs émissions de gaz à effet de serre et de limiter le réchauffement global à moins de 2°C par rapport à l'ère préindustrielle. Le protocole de Kyoto expirera fin 2012. Le traité conclu en 1997 engage les pays développés à réduire de 5,2% en moyenne leurs émissions. A. B.