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Le sombre destin des salles obscures
Les cinémas au creux de la vague
Publié dans La Tribune le 23 - 12 - 2010

Revenir encore sur le nombre - qui se chiffre par centaines - de salles de cinéma que comptait l'Algérie au lendemain de l'indépendance est bien inutile. Il suffirait de rappeler que chaque ville du pays avait ses grandes salles de projection et ses cinémas de quartier. Il y a même des villages où les habitants avaient droit à leur projection hebdomadaire dans la petite salle du bourg. En ces temps-là, le 7ème art faisait partie de la vie des Algériens. Les plus de cinquante ans peuvent vous parler sans tarir des films qu'ils ont vus dans leur jeunesse, des mille et une astuces qu'ils déployaient pour se dégoter les quelques sous nécessaires à l'achat du sésame qui leur ouvrait les portes du temple, de l'ambiance des entractes, de la beauté des placeuses…Et si on les ramène au présent, on voit leurs traits se creuser et leur visage s'assombrir. Il y a de quoi ! La quasi-totalité des salles de cinéma sont aujourd'hui fermées. Certaines sont dans un tel état de ruine qu'on aurait du mal à croire qu'elles ont un jour brillé de mille feux et qu'elles ont été l'antre du 7ème art. Il est tout aussi inutile de ressasser les raisons et les responsables de cette ruine qui sont connus - une politique inconséquente et des dirigeants irresponsables - de tous.Réjouissons-nous seulement que le constat fait depuis longtemps ait fini par susciter la réaction tant attendue : le ministère de la Culture s'est engagé à récupérer toutes les salles de cinéma, les réhabiliter et les administrer, en attendant qu'elles soient attribuées à des gérants qui devront répondre au cahier des charges que le ministère élaborera. Mieux, le département de Khalida Toumi se propose même de former des jeunes pour leur confier la gestion des cinémas.
C'est là, indéniablement, une bonne initiative, nécessaire, mais hélas insuffisante. Car à quoi serviraient des salles de cinéma, si belles, neuves et modernes soient-elles, s'il n'y a pas de production cinématographique, si les quelques distributeurs qui existent ont tout le mal du monde à importer un film et le faire tourner, s'il n'y a pas les personnes qu'il faut à la place qu'il faut pour faire tourner
la machine ?La salle de cinéma n'est qu'un maillon de toute une chaîne, c'est même le dernier. Ainsi, il serait illusoire de croire qu'on puisse relancer le 7ème art en Algérie avec des salles retapées à neuf, des festivals, quelques films et des conseils qui «se marchent sur les pieds». Il ne s'agit plus de relancer la production de films, d'organiser la distribution ou de trouver des formules d'aide à la création uniquement, mais de mettre en place l'industrie cinématographique, avec tous ses segments, qui doivent être opérationnels et performants. Et la création de cette industrie nécessite l'implication de différentes institutions et ministères.
H. G.


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