Photo : S. Zoheir Par Abdelkrim Ghezali La situation sociale était bouillonnante depuis un certain temps, en raison d'un cumul de problèmes sociaux et d'une gestion hasardeuse des affaires publiques par certains départements ministériels et administrations locales. Le logement a déjà nourri une série d'émeutes tout au long des derniers mois de 2010. Quant à certains chômeurs qui désespéraient d'une solution à leur détresse, ils avaient opté depuis des années pour le risque de suicide collectif dans une aventure aussi désespérée. Les dernières augmentations de salaires qui ont touché tous les secteurs de la Fonction publique et du secteur économique sont rognées jour après jour par l'inflation et par la spéculation des tenants des marchés formel et informel. A chaque occasion, comme le Ramadhan, l'Aïd ou autres maoussim, les prix des produits de première nécessité flambent sans aucune raison valable. Le ministère du Commerce se contente à chaque fois de dénoncer et d'expliquer la cupidité de certains grossistes et détaillants véreux. Mais lorsqu'il a pris la bonne décision visant à structurer le marché, à combattre l'informel et à permettre une réelle décantation, il décide d'annuler les dispositions parce que des émeutes ont éclaté un peu partout à travers le pays. En d'autres termes, les mesures devant combattre le marché parallèle, les fuites fiscales et la prédation, comme l'achat avec facture et le payement par chèque, auraient provoqué la colère populaire !Si les ingrédients d'une protestation sociale contre le mal de vivre et pour exprimer un ras-le-bol d'une situation étouffante, notamment pour les jeunes laissés-pour-compte d'une politique qui ignore les préoccupations de la jeunesse sont réunis, il est tout aussi évident que des manipulations visent à créer une situation de psychose et de tension qui arrange certains lobbies d'affairistes que les lois de finances et les LFC de 2009, 2010 et 2011 dérangent et dont les dispositions menacent les intérêts. La colère des jeunes et des moins jeunes est légitime. Si la rue algérienne bouge, c'est un bon signe d'une société vivante qui refuse de se soumettre à la fatalité et qui aspire au bien-être. Mais la destruction des biens privés et publics va à l'encontre des revendications légitimes puisque des activités économiques et commerciales vont s'arrêter et ce sont d'autres chômeurs qui vont rejoindre ceux qui cherchent un emploi. Donc, ces émeutes n'ont aucune logique sauf celle de provoquer une situation intenable et de raviver les angoisses des années quatre-vingt-dix lorsque le terrorisme urbain faisait peser une chape de plomb sur la majorité des Algériens. A ce propos, ces émeutes ont éclaté au moment où d'importantes poches de terroristes sont encerclées un peu partout Ne vise-t-on pas à desserrer l'étau sur les maquis terroristes d'autant plus que les actes de sabotage, de vol et d'agression contre les citoyens et leurs biens ont été signalés partout ? Des barrages fixes ont été levés, les forces de sécurité sont mobilisées pour circonscrire les émeutes, laissant le champ libre à ceux qui ont des objectifs plus graves pour sévir à leur guise. Les citoyens ont parfaitement le droit de manifester et d'exprimer leurs revendications à travers des marches pacifiques, des sit-in, des grèves sans créer des tensions qui menaceraient la stabilité du pays. Les pouvoirs publics sont interpellés pour rassurer les citoyens, leur donner des explications officielles et s'engager à combattre efficacement les causes du malaise social.