Photo : S. Zoheïr Par Samira Imadalou Pour le retour des prix des produits de large consommation à la normale, l'Etat est en phase de faire une grande concession au secteur informel. C'est du moins la première lecture à faire après la dernière sortie du gouvernement. Par le biais du ministre du commerce, Mustapha Benbada, le gouvernement a en effet annoncé jeudi dernier une série de mesures dans le but de faire baisser les prix et, par ricochet, la tension que connaît la rue depuis le début de cette année à travers de nombreuses régions du pays. Le gouvernement a opté pour la facilité à travers une solution conjoncturelle en remettant carrément en cause la série de règlements adoptés en matière de distribution des produits de large consommation. Mais ce choix risque de coûter cher à l'économie nationale puisqu'il favorise l'informel. Lors d'une réunion avec les producteurs et importateurs d'huile et de sucre, principaux produits touchés par les hausses vertigineuses, le ministre du Commerce a appelé à annuler toutes les conditions imposées aux grossistes et qui sont à l'origine de la hausse des prix. Ainsi, il leur a donné carte blanche pour activer dans l'illégalité juste pour assurer l'approvisionnement du marché aux prix appliqués auparavant. «Nous estimons que nous avons commencé à maîtriser cette crise, et nous espérons qu'elle se terminera la semaine prochaine», a-t-il indiqué à l'APS. «Les problèmes liés aux nouvelles conditions d'approvisionnement imposées aux grossistes ont été résolus.» Mais à quel prix ? La situation qui a déclenché la colère des citoyens sera réglée moyennant l'annulation de toutes les mesures annoncées depuis quelque temps par le gouvernement pour réguler le marché. Ces mesures portent, pour rappel, sur la fourniture par les détaillants (aux grossistes et transformateurs) de documents justifiant leur activité, notamment le registre du commerce, l'achat par facture, et leur bilan comptable (comptes sociaux), ainsi que l'utilisation du chèque pour le paiement des marchandises dont le montant dépasse 500 000 dinars à partir du 1er avril prochain. En justifiant la hausse des prix par le nouveau règlement régissant le secteur du commerce, Benbada n'a fait que se contredire. La semaine dernière, il avait expliqué la hausse par l'augmentation des prix sur le marché international. Certes, c'est le cas, depuis quelque temps, notamment depuis la crise alimentaire de 2008. Mais il faut dire que la dernière sortie de Benbada constitue un recul du gouvernement face à l'informel puisque toutes les mesures annoncées sont considérées comme la source de la hausse. Or, la régulation du marché a toujours constitué un casse-tête pour le gouvernement qui a, dans la majorité des cas, opté pour des solutions conjoncturelles sans aller au fond des problèmes. Même la création des offices n'a pas mis fin aux crises récurrentes que connaissent certaines filières agricoles, à l'image de celle du lait. Cette fois-ci, on ne trouve pas mieux à faire que d'imputer la hausse à l'application des méthodes légales dans les transactions commerciales. Les grossistes sont d'ailleurs invités à faciliter les conditions aux détaillants. Idem pour les producteurs vis-à-vis des grossistes et des distributeurs. Le mal du marché national est beaucoup plus profond. Il nécessite une stratégie de fond réfléchie et adaptée aux besoins du pays. En attendant, un groupe de travail a été installé en vue de permettre aux producteurs de contribuer à la mise en place de mécanismes réglementaires et de textes d'application de la loi sur la concurrence ainsi que des nouvelles pratiques commerciales relatives à la définition de la marge bénéficiaire des produits de large consommation. S. I. Hausse des prix : un conseil interministériel aujourd'hui pour trouver des solutions Un conseil interministériel se penchera aujourd'hui sur la problématique de la hausse des prix. C'est ce qu'a annoncé hier le ministre du Commerce, Mustapha Benbada, cité par l'APS. Cette réunion sera consacrée à la hausse des prix des principaux produits de large consommation. Le gouvernement se penchera sur les textes d'application des lois relatives à la concurrence et aux pratiques commerciales, notamment l'aspect relatif à la définition des marges bénéficiaires des produits de large consommation, a précisé le ministre. Le gouvernement ira-t-il jusqu'à supprimer les taxes sur ces produits pour faire baisser les prix ?Cette question s'impose puisqu'il a reconnu que la décision des grossistes de facturer la TVA aux détaillants pour se conformer aux nouvelles lois sur la distribution a contribué fortement à cette hausse.