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Ces jeunes harraga qui «bravent» la mer
Ghazaouet, aux frontières de la mort
Publié dans La Tribune le 01 - 09 - 2008


De notre envoyée spéciale à Ghazaouet
Amel Bouakba
Du haut de ses 10 ans, il rêve déjà de partir, il n'a qu'une envie : el harga… Saïd est hémophile. En dépit de son jeune âge et de sa maladie chronique, cet enfant d'Aïn Témouchent, rencontré à Ghazaouet lors d'une colonie de vacances organisée au profit des enfants malades, a des rêves plein la tête.
Des rêves insensés et si naïfs qu'il n'hésite pas à partager et à défendre avec l'impatience et l'acharnement des enfants. Il veut surtout faire comme son oncle, c'est-à-dire «se casser», rejoindre l'autre rive de la Méditerranée, en quête d'une vie meilleure. «Là où il n'y a pas de souci, pas de problèmes de médicaments, ni de scolarité… un pays dans lequel je ne me préoccuperais pas de soins ni de traitements au lieu de faire mes devoirs… ou tout simplement de m'amuser», dit-il. Et, paradoxalement, Saïd ne choisit pas un pays européen pour sa fameuse traversée, mais se contente d'un pays voisin. «Je veux partir là où la vie est moins chère, moins pénible», lâche-il, innocemment. Son désir pressant de partir en dit long sur la détresse des jeunes Algériens. Pas seulement. Même les adolescents et les enfants envisagent mal leur avenir, ils se sentent livrés à eux-mêmes dans un pays aux richesses pourtant multiples et exceptionnelles mais qui ne profitent pas à ses enfants.
Nous sommes à Ghazaouet, dans la wilaya de Tlemcen, à 600 kilomètres d'Alger, une ville côtière à l'ouest de Maghnia, à la frontière marocaine. Les mêmes maux rongent la jeunesse algérienne. Chômage, oisiveté et misère… les jeunes désœuvrés dans les rues… les yeux rivés sur la mer, les yeux rivés sur l'autre bord de la Méditerranée…
Le phénomène de harraga qui signifie dans le langage des jeunes «resquiller et brûler» augmente de jour en jour, ici comme sur les côtes est du pays. Devant le chômage, les conditions de vie insoutenables, les jeunes de Ghazaouet n'hésitent pas en désespoir de cause à se jeter à l'eau pour rejoindre les rives nord de la Méditerranée, en quête de l'eldorado, à la recherche de leurs rêves perdus. Bien souvent, la mort les guette au tournant. Mais le risque d'une mésaventure ne semble point les décourager.

L'Etat «insensible» à la détresse des jeunes
Si les jeunes Algériens diplômés se sentent lésés dans leur propre pays, ceux sans qualification le sont encore plus. Ils se sentent perdus et veulent coûte que coûte tenter leur chance sous d'autres cieux «plus cléments», croient-ils, comme le confie Ali, un enfant de la région qui connaît pas mal de proches, copains, voisins qui se sont lancés dans cette dangereuse traversée. Certains ont réussi à atteindre la côte espagnole, d'autres ont péri, dit-il avec amertume. C'est dire que ces jeunes sont conscients du danger qu'ils encourent, mais n'hésitent pas à franchir le pas décisif, pour échapper à «la misère ambiante». «On a vécu toute notre vie à Ghazaouet et on ne voit pas le bout du tunnel», déplore notre interlocuteur désabusé par la situation de la région. Pour lui, l'Etat n'a absolument rien fait pour les jeunes. Comme beaucoup qui tentent en vain d'obtenir un visa pour la France, l'Italie, l'Espagne, l'Angleterre ou le Canada, les harraga de Ghazaouet se lancent dans l'incroyable aventure collective de l'émigration clandestine. Pour ces jeunes harraga, rejoindre l'autre rive de la Méditerranée est un rêve qu'ils caressent et mûrissent des années durant. «J'ai beaucoup de copains qui ont tenté cette traversée. Ce voyage s'avère périlleux, car ils font le voyage collectif à bord d'embarcations construites de manière artisanale. Ils n'ont qu'un seul objectif, fuir le pays dans lequel ils n'ont pas réussi à avoir une vie décente.» «Des jeunes de 16 à 35 ans qui veulent en finir avec la misère, le chômage, les nombreuses préoccupations qui minent leur vécu», confesse Mohamed, un enfant natif de la région qui évoque des cas de jeunes harraga. Il parle de ces victimes de noyade au cours de leur périple. «El harga» est un phénomène, dit-il, très répandu dans la région comme partout à travers le pays, en raison du chômage notamment. «Les jeunes traversent la mer pour rejoindre la côte espagnole, le voyage Ghazaouet-Al Miria ne dure pas longtemps, six heures», dit-il. «Beaucoup de jeunes viennent de partout d'Algérie, tentant El Harga à partir de là. Ils cotisent pour acheter de petites barques qui n'offrent aucune commodité, aucune sécurité et se lancent dans leur voyage, au risque d'y laisser leur peau.»
Notre interlocuteur raconte avec chagrin les péripéties de ses copains, des jeunes harraga qui ont péri en mer. «J'en connais beaucoup qui ont disparu en mer et j'en veux à notre Etat qui a conduit au pourrissement de la situation de la jeunesse… Qu'est-ce qui est fait pour aider les jeunes à sortir de leur désarroi ?»
s'interroge-t-il encore, hors de lui. A Ghazaouet, la seule occupation des jeunes est la pêche, il n'y a aucun projet d'investissement, il n'y a pas d'usine…
Pour lui, les pouvoirs publics semblent insensibles à la détresse de ces jeunes qui mettent leur vie en péril. «L'Etat est indifférent face à leurs légitimes revendications, puisque aucun projet réel
n'est venu apporter l'espoir à cette frange de la société. »
«Les préoccupations de l'Etat sont ailleurs», expliquent dans le même ordre d'idées d'autres enfants de la région. Pourtant les statistiques sur le sujet sont éloquents et parlent d'eux-mêmes, c'est
un phénomène qui prend de l'ampleur.
Les chiffres enregistrés durant le premier semestre 2008 montrent que 718 Algériens tentant d'émigrer clandestinement en Europe ont été arrêtés et 38 embarcations saisies. Plus de 1 500 candidats à l'émigration clandestine avaient été arrêtés en 2007 en Algérie, contre 1 016 en 2006. Des sommes faramineuses sont déboursées pour organiser des rencontres sur la jeunesse sans qu'aucune solution concrète ne voie le jour et sans que l'une d'elles parvienne à freiner, un tant soit peu, le phénomène.

Un port de pêche délaissé…
Située à 75 km de Tlemcen et 18 km de Nédroma, la région de Ghazaouet offre des paysages sublimes, de belles forêts de pins, de thuyas et de cyprès surplombent la mer.
La ville renferme aussi d'intéressants vestiges de vieux forts berbères (épaisses murailles flanquées de grandes tours carrées). On raconte que l'Emir Abdelkader passa sa dernière nuit avant d'être
expatrié d'Algérie, à Ghazaouet, plus exactement dans une villa rue de Touent du nom de la montagne qui se trouve à l'est de Ghazaouet. Mais que signifie donc Ghazaouet ? De son vrai nom «Djemaa el Ghazaouet», cette ville tire son appellation, d'après la légende, de repaire ou réunion de brigands.
En fait, il ne s'agissait pas de brigands comme on l'entend aujourd'hui mais plutôt de naufrageurs. On dit qu'ils allumaient des feux sur la plage où venaient s'échouer des bateaux trompés par les feux.
Au début de la colonisation, Ghazaouet était une petite crique presque inhabitée. Elle connaîtra à partir de cette période l'établissement d'une base militaire qui a permis la pénétration française dans l'Ouest oranais. Il faut dire que Ghazaouet a été le premier port de pêche d'Algérie. Cette ville a été longtemps réputée pour ses fameuses sardines et surtout pour ses anchois. L'usine Papa Falcone était célèbre dans tout le pays.
Le trafic maritime était d'ailleurs plus important que celui d'Oran et même que celui d'Alger. Ghazaouet est incontestablement un port important de pêche et de commerce mais qui est malheureusement
complètement délaissé et abandonné. Le développement dans cette région, on le constate, a du mal à prendre son envol.
Les barons de la contrebande sévissent toujours
La contrebande est prospère à Ghazaouet. Les mesures de contrôle à la frontière marocaine ne semblent pas venir à bout de ce fléau qui prend des proportions alarmantes dans le pays. La liste des produits exportés frauduleusement vers nos voisins est longue. Tout se vend et tout s'achète. Mais c'est le carburant, en raison de son prix élevé au Maroc, qui demeure assurément le produit le plus convoité. A Ghazaouet, des files interminables de véhicules attendent leur tour devant les stations d'essence. Les trabendistes attendent la nuit tombée pour traverser la frontière à dos d'âne avec des chargements de gasoil qu'ils revendent à nos voisins marocains. Ce trafic a donné naissance dans l'ouest du pays à de véritables barons qui exportent frauduleusement des produits de tous genres très recherchés outre-frontière : du carburant, des produits alimentaires, de la drogue, du corail et autres matériaux sont revendus par ces trabendistes. Ces derniers ne semblent jamais s'avouer vaincus, ils usent de nombreux moyens frauduleux pour enrichir les pays voisins sans se soucier du sérieux coup porté à l'économie nationale.
A. B.
Le poisson exporté illicitement vers l'Espagne
Ceux qui croyaient que le poisson était beaucoup moins cher à Ghazaouet qu'à Alger vont vite déchanter. Les prix sont aussi élevés que dans la capitale. Le kilogramme de sardine excède largement les 100 dinars, la crevette est à 1 200 DA, le merlan à 500 dinars, le rouget à 700 dinars… «Ghazaouet livre le poisson partout», nous dit un enfant de la région. On dit même que le poisson est exporté illicitement vers l'Espagne.
Absence de structures touristiques
Peu d'investissements sont lancés dans cette belle région côtière aux potentialités immenses. Cette ville ne dispose que d'une seule infrastructure hôtelière, l'hôtel privé Ziri. A la dernière classification, il lui a été décerné trois étoiles. Selon son gérant, Abdelkader Bouni, «c'est l'unique hôtel dans la localité de Ghazaouet. Il déplore le fait que sa demande formulée auprès des autorités concernées et du wali de Tlemcen d'une extension du projet et de la réalisation d'un nouveau projet à Tlemcen, soit restée sans écho. Abdelkader Bouni gère l'hôtel Ziri depuis 2001 (auparavant cette structure était un bien communal). Cet hôtel a une capacité de 34 chambres. «Le taux d'occupation annuel frôle les 70%, en revanche il atteint les 100% durant la saison touristique», précise son gérant. Sa clientèle est composée de nationaux, d'émigrés et d'étrangers. «Durant l'été, il est difficile de faire face au flux d'estivants et de voyageurs qui foulent le sol de la région», explique-t-il.

Un projet émirati près de Marsa Ben'Hidi
Des Emiratis comptent investir dans cette région. La construction d'un projet touristique émirati a été annoncé pour combler le manque criant d'hôtels dans la région, apprend-on.
Il s'agit d'un projet touristique de haut standing qui sera lancée à Bider, à une cinquantaine de kilomètres de Ghazaouet, près de Marsa Ben'Hidi. La région de Ghazaouet enregistre un flux important d'émigrés résidant à l'étranger qui font un come-back, le temps des vacances. La région fait face chaque été à une affluence record de la communauté émigrée originaire de Ghazaouet ou de l'Ouest algérien qui transitent par la région. Pour rappel, une ligne maritime quotidienne Ghazaouet-El Miria a été ouverte au début des années 2000.


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