Photo : M. Hacène Par Ali Boukhlef Les familles victimes de terrorisme de la commune de Sidi Moussa (20 km au sud d'Alger) vivent une double peine : celle d'avoir perdu un être cher pendant la décennie noire et celle, encore plus amère, de se sentir «méprisées et marginalisées».C'est le cas de 12 familles de cette localité qui figure dans la triste liste des communes ravagées par le terrorisme. Parce qu'elles n'ont pas bénéficié des logements qui leur sont destinés, ces familles ont entamé, depuis cinq jours, un mouvement de protestation pour demander «leur droit», a-t-on constaté sur place. Des membres de ces familles se sont installés sur le toit d'un immeuble qui contient des appartements vides pour attirer l'attention des autorités sur leur situation.Avant d'en arriver là, ils ont tenu à relater les faits. D'abord, les logements. Il s'agit d'un groupement d'immeubles dont la construction a été financée par l'ambassade du Koweït à Alger, déclare Abdelkader, une des victimes du terrorisme. «Une délibération de la commune a définitivement attribué ces logements aux familles victimes de terrorisme», a-t-il précisé.Tout est allé dans le bon sens. Sauf que, durant l'année 2007, le ministère de la Solidarité s'est mêlé de l'affaire. «Le ministère a changé la liste des bénéficiaires», indique Abdelkader. «Nous avons vu arriver des veuves qui n'habitent même pas Sidi Moussa. Certaines familles sont venues d'autres wilayas», a-t-il relevé, sous le regard d'autres victimes. Pis, les protestataires accusent certains résidents de s'adonner «à la débauche». «Nous ne pouvons pas sortir en famille le soir», disent-ils tout en demandant une commission d'enquête sur les circonstances de l'attribution de ces logements. Seize unités ne sont toujours pas attribuées, alors que des familles habitent dans des logements insalubres. «Cela fait cinq jours que nous sommes là et personne n'est venu nous voir», s'écrie Fouad, qui a perdu plusieurs membres de sa famille. «Pis, le chef de la Sûreté urbaine nous nargue en nous disant : ‘‘si vous n'êtes pas contents, vous n'avez qu'à vous jeter de la terrasse''», ajoute-t-elle. Malgré cela, précise Fouad, «nous ne tombons pas dans leur jeu. Nous luttons pacifiquement jusqu'à la satisfaction de nos revendications».Du côté de l'administration, c'est le silence radio, à part une visite du wali délégué «qui n'a rien vu», selon nos interlocuteurs qui précisent que la police les a contenus à l'intérieur de l'immeuble lors de sa venue. «Nous avons tenté de rencontrer le président de l'APC de Sidi Moussa, en vain». «Il est en réunion avec les moudjahidine», s'est contenté de dire un agent rencontré dans le hall de la mairie.Pendant ce temps, les protestataires passent leur cinquième nuit à la belle étoile. En attendant un toit décent.