Photo : M. Hacène De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar Des artistes et des intellectuels de la ville de Béjaïa ont investi récemment la rue pour dénoncer la mauvaise gestion du secteur de la culture et le rétrécissement des espaces qui lui sont consacrés à travers la wilaya. Chanteurs, dramaturges, jeunes écrivains et animateurs culturels, qui ont créé à l'occasion un collectif pour défendre leur cause, dénoncent «le mépris de la direction locale» à l'endroit des femmes et des hommes de culture et «le verrouillage des espaces d'expression». Dans une correspondance adressée au ministère de tutelle, les protestataires dressent un constat alarmant sur «les embûches dressées à l'action culturelle authentique» et établissent un volumineux dossier sur «la mauvaise gestion des deniers publics consacrés à cet effet». Les protestataires exigent une enquête sur la gestion douteuse de ces fonds et «la sanction des responsables de cette mascarade». En termes d'infrastructures, les espaces culturels existent dans toutes les communes de la région. Même si la qualité et la quantité des moyens disponibles ne répondent pas parfois aux espoirs des «culturalistes», chaque municipalité dispose généralement d'un centre culturel, d'une bibliothèque et parfois d'une salle de cinéma. Mais ces établissements, qu'ils soient sous la tutelle des APC ou de celle de la direction éponyme, restent généralement sous-exploités faute d'initiatives et de programmation régulière. La demande existe pourtant. Les citoyens se plaignent souvent du manque de ce genre d'événements pour s'instruire, sortir en famille le soir ou acquérir des lectures nouvelles. Sachant pertinemment que la culture et le savoir participent à l'épanouissement de leurs facultés intellectuelles et au développement de l'esprit critique, les populations sont, de plus en plus, enclines à défendre leurs droits culturels. Le mouvement associatif local ne cesse, en effet, de plaider pour l'ouverture des écoles d'art (théâtre, musique, arts plastiques, cinéma…), destinées à dispenser un enseignement académique à même de hisser la qualité de la production artistique. «Au lieu de dépenser le budget culturel dans des festivals de pacotille et des célébrations diverses, on ferait mieux de construire des instituts pour développer l'enseignement des filières artistiques et culturelles», lit-on dans une contribution rendue publique par les membres de ce collectif embryonnaire des artistes de la wilaya de Béjaïa. «Pas d'écoles d'art, la cinémathèque est toujours fermée (depuis trois ans pour travaux n'excédant pas trois mois), les centres culturels inopérants, la maison de la culture indigente, la gestion clientéliste des affaires culturelles,…», énumère-t-on encore dans le même document pour décrire la situation présente du secteur et réclamer une nouvelle politique dans la prise en charge de ce dossier. En plus des écoles d'art, les artistes et les associations revendiquent aussi l'ouverture inconditionnelle des espaces d'expression aux collectifs culturels et associations sans distinction, l'octroi de subventions aux associations sur une base saine, le respect de la liberté d'organisation et de création artistique et littéraire. Tout un programme.