Photo : Riad Par Faouzia Ababsa En dépit des dernières augmentations de salaires, touchant aussi bien le secteur économique que la fonction publique, le pouvoir d'achat des Algériens n'a non seulement pas progressé, mais régressé. Cela en raison de la spéculation et de l'augmentation sans cesse des prix des produits de large consommation. Des mesures urgentes ont été prises par les pouvoirs publics, mais qui n'auront pas d'incidences durables, tant que les situations monopolistiques de certains opérateurs économiques perdurent. Il ne s'agit pas seulement des prix du sucre et de l'huile, car les Algériens ne consomment pas uniquement ces deux produits. Ayant toujours œuvré pour la signature des conventions de branches dans le secteur économique public et privé, même si ce dernier reste encore très timide en matière d'augmentation des salaires, criant sans cesse à qui veut bien l'entendre qu'ils n'ont pas les moyens financiers, l'UGTA - et c'est devenu une tradition - a formulé un certain nombre de propositions relatives à l'amélioration du pouvoir d'achat qu'elle a transmises aux pouvoirs publics. Elles se résument en sept chapitres. Le premier a trait à l'ouverture et l'organisation des marchés de gros. Selon les rédacteurs du document, cette proposition «vise à densifier le réseau de distribution en multipliant les marchés de gros en vue d'atomiser les marchés», le but étant d'éviter la création d'un déséquilibre et l'émergence de goulots d'étranglement. L'objectif visé par cette ouverture et cette organisation des marchés de gros réside dans la réactivation de l'Ofla que l'UGTA estime être plus que jamais d'actualité. «Ce dispositif permet de juguler les prix autour d'un niveau socialement acceptable et économiquement viable. Cette action encouragera la commercialisation de la production nationale et la maîtrise du marché par l'établissement d'une mercuriale des prix.» La Centrale syndicale défend sa proposition par des expériences qui ont déjà réussi à l'image de la mise en place, en 2008, du Syrpalac pour la pomme de terre, qui a permis la maîtrise du marché. Plus que cela, la réouverture de l'Ofla aura un impact non négligeable sur la création de nouveaux postes d'emploi. L'UGTA a même fait une simulation. Ainsi, avec la création de trois marchés de gros par wilaya et un investissement de 60 millions de dollars, ce sont pas moins de 1 500 emplois qui seront générés durant la phase d'investissement, 1 000 durant la phase d'exploitation et 3 000 emplois indirects. Les marchés de détail ne sont pas omis dans la simulation faite par la Centrale syndicale. Ce seront des marchés de 5 000 places pour un investissement de 6 millions de dollars, 500 emplois créés durant la première phase, 20 000 durant la période d'exploitation et 60 000 emplois indirects. Pour la réactivation de l'Ofla proprement dite avec 48 antennes et un investissement de 16 millions de dollars, ce sont 1 000 emplois en phase d'investissement, 1 200 lors de l'exploitation et 4 000 emplois indirects. Tout cela aura pour conséquence la diminution des marges des prix et, par là même, la réduction des prix à la vente au consommateur, la réduction des marges des prix de vente au détail et, enfin, la création d'une économie d'échelle et le plafonnement des prix à la vente au détail et au total une création de 92 182 emplois directs et indirects.Dans son document, l'UGTA propose la réactivation de l'Office national d'importation et de commercialisation (Onaco). «Cet office, distributeur public de ces produits, permettra de réguler les prix et les marges de bénéfice des produits d'importation tels que les légumes secs, le café, le thé, le sucre, etc.» Créer un office de régulation et de commercialisation de viande «aura un impact direct sur les prix à la consommation, d'un côté. De l'autre, elle encouragerait la production nationale qui trouverait une régularité» des débouchés des produits d'élevage et dérivés pour permettre également d'alimenter la filière production lait et ses dérivés. Tant il est vrai que cette filière est totalement désorganisée, d'où la spéculation sur les prix. Toujours dans le cadre de la filière viandes rouge et blanche, une simulation a été faite par les rédacteurs du document ; là aussi, la création de nouveaux postes d'emploi n'est pas à négliger. Ce sera au total 236 117 nouvelles recrues qui pourront y travailler.La réouverture des grandes surfaces en partenariat avec le privé figure également parmi les propositions de l'UGTA. Dans le but d'éviter les situations de monopole, «ces grandes surfaces, longtemps créatrices d'emplois et outil très important de régulation des prix de produits de large consommation, seraient destinées à commercialiser exclusivement la production locale et les produits subventionnés de large consommation», écrit l'UGTA qui juge que ce dispositif viendra nécessairement à bout des spéculations qui rongent le pouvoir d'achat des couches diminuées de la population et créerait en parallèle des postes d'emploi importants. «Plus que cela, il améliorerait l'efficacité et le ciblage des transferts sociaux de l'Etat.»En somme, ce sera un dispositif qui endiguerait quelque peu les dépenses à tout-va et ferait faire d'énormes économies au Trésor public. La Centrale syndicale propose aux pouvoirs publics de revenir au système des coopératives de consommation et réexamen du crédit à la consommation. Des expériences qui ont fait leurs preuves. Elles permettent l'achat en gros des produits de large consommation. «Ce dispositif doit être accompagné par le réexamen du crédit à la consommation en direction des ménages pour acquérir des biens et services produits localement.» Il ne s'agit donc pas de vendre à crédit des véhicules importés ou des biens qui nous viendraient d'outre-mer, mais d'encourager la production nationale publique ou privée et, par ricochet, la création de nouveaux postes d'emploi lorsque la demande se fait plus importante. 10% du budget d'un ménage est consacré aux charges locatives. C'est la conclusion à laquelle est arrivée l'Union générale des travailleurs algériens. Celle-ci estime d'ailleurs que les changements sociaux et l'évolution de la population «prédisent un accroissement de la demande de logement. Aussi, pour éviter des pressions et des tensions sur le marché immobilier, la Centrale propose de soutenir fortement le prix du ciment et des matériaux de construction produits localement. Enfin, l'UGTA soulignera qu'une révision de la fiscalité et des taxes douanières est importante «afin de les mettre en cohérence avec les objectifs d'encouragement de la production nationale, la création d'emplois et de défense du pouvoir d'achat des citoyens». Voilà des propositions concrètes avec des simulations de mise en œuvre concrètes qui tranchent avec les discours creux rébarbatifs qu'on a l'habitude d'entendre. Reste à savoir si les pouvoirs publics en tiendront compte ou à tout le moins les étudieront, des fois qu'ils trouvent matière à concrétisation.