Photo : Riad Par Abdelkrim Ghezali Le marché informel gangrène l'activité commerciale et squatte les espaces publics comme les trottoirs, les places et les rues, donnant un visage délabré et insalubre aux villes et villages du pays. S'il est du droit des jeunes chômeurs sans formation ni qualification de se débrouiller pour se prendre en charge et nourrir leurs familles, les pouvoirs publics n'arrivent toujours pas à trouver une solution définitive qui permette à ces jeunes d'avoir une activité commerciale légale et réglementée et de préserver les espaces publics destinés aux piétons et aux automobilistes. Cette équation est devenue un casse-tête aussi bien pour les autorités locales que nationales. Le marché informel est généré par la crise économique et la stagnation de la croissance, conjuguées à une forte croissance démographique et une énorme déperdition scolaire. Cependant, le gain facile et l'évasion fiscale ont encouragé l'activité parallèle que pilotent de gros importateurs et producteurs exploitant le désarroi de ces milliers de désœuvrés pour phagocyter le marché formel. Ce phénomène a commencé à prendre de l'ampleur au milieu des années 80 pour s'exacerber pendant la décennie noire et s'élargir à toute l'activité commerciale et même à une certaine activité industrielle, puisque des ateliers clandestins de fabrication de différents produits manufacturiers ont poussé çà et là, pour aggraver le marché de produits piratés. Afin de juguler cette activité, le gouvernement avait envisagé au début des années 90, d'intégrer ce secteur dans le marché officiel, en vain. Les habitudes semblent avoir la peau dure et les gains générés par cette activité qui se réalisent en dehors de toute bureaucratie sont inestimables, dans la mesure où, selon des statistiques approximatives, le marché informel représenterait plus de 20% du PIB. Au début des années 2000, la solution consistait à traquer les étals informels, sans résultat. Mais le harcèlement à l'égard des vendeurs à la sauvette et des commerçants non agréés a nourri une rancœur qui s'est vite transformée en émeutes à répétition menées, notamment, par des jeunes qui n'ont d'autres choix que de recourir à cette activité pour gagner leur vie. Pourtant, la grande menace vient de gros importateurs et producteurs, dont les produits aux origines suspectes envahissent le marché, y compris formel, et qui se vendent sans factures pour échapper au fisc. Quant aux petits revendeurs qui polluent, certes, les espaces publics, ils auraient pu être pris en charge par les collectivités locales en créant des espaces aménagés pour les y installer et commencer un travail pédagogique progressif afin de les intégrer, à terme, dans le marché formel, en faisant preuve d'imagination et de souplesse dans le traitement de ce phénomène. Un document provisoire autorisant leur activité et la réglementant à travers une sédentarisation aurait pu être un prélude à l'absorption du marché informel de masse dans le marché officiel, dans la perspective de leur régularisation en leur imposant un registre du commerce et un numéro fiscal. Ces derniers temps, les pouvoirs publics semblent avoir baissé les bras à travers une attitude du «laisser-faire» qui s'explique par la tension sociale et la crainte d'une contagion des révoltes qui se déroulent dans certains pays arabes.