C'est sans définir ni le temps ni l'espace que le metteur en scène algérien Hamma a abordé, dans sa dernière pièce le Rêve d'un père, un sujet terriblement d'actualité puisqu'il s'est intéressé aux révolutions citoyennes nées d'un ras-le-bol dominant, fruit de la corruption et de la maltraitance de l'humain. Produite par le Théâtre national algérien dans le cadre de la manifestation «Tlemcen, capitale de la culture islamique 2011», la pièce, présentée jeudi et vendredi derniers sur les planches du TNA, relate le terrible combat que mène un groupe d'intellectuels en pleine campagne présidentielle. Merquia est une vieille dame dont la fille Magdalina est portée disparue. Cette dernière est recherchée par l'armée. Son époux Firaz, qui est également recherché, garde leur enfant encore nourrisson. Firaz rend visite à Merquia et lui annonce une terrible nouvelle : il est noyé jusqu'au coup dans l'affaire de kidnapping de la femme du gouverneur. En fait, c'est le meilleur ami de Firaz, amoureux de la future première dame du pays, qui l'a kidnappée avec son consentement.Quelques instants après, le gouverneur fait irruption dans le gourbi de Merquia la menaçant de tuer ce qui lui reste de famille. En parallèle, la révolution se prépare et menace de renverser l'ordre établi. Firaz et ses amis sont vite arrêtés et condamnés à être exécutés à l'aube. Mais ils seront sauvés de justesse par un groupe militaire qui soutient leur cause. Son enfant dans les bras, Firaz peine à le nourrir. Il attend désespérément le retour incertain de Magdalina. Pendant ce temps, des représentants de l'ONU s'invitent au pays, la tête pleine de clichés et de mauvaises intentions. Il faut tout faire pour éliminer toute rébellion du peuple et maintenir l'ordre dans le pays dont la communauté internationale a besoin. «Massacrez les intellectuels, bannissez leurs femmes rebelles et propagez l'ignorance, c'est le seul moyen de faire de ce pays un bon terrain d'investissement», ordonnent-ils au gouverneur. Une femme détenue est présente sur les lieux et n'hésite pas à leur cracher au visage en les traitant d'«organisation sioniste et criminelle».Angoisse et peur sont les fidèles compagnons de ces révolutionnaires qui sont déterminés à arracher leurs droits. Parfois, il faut savoir se sacrifier pour les générations à venir. Firaz regarde son bébé et tente de se convaincre de cette vérité. Emouvante et teintée de violence sur fond de coups de feu et d'aboiements de chiens, la pièce le Rêve d'un père est d'un réalisme troublant reflétant le désir de l'auteur de coller à l'actualité et soucieux de la qualité de son œuvre. Le texte est présenté en arabe dialectal, un fait que l'on salue vu qu'il signe la réconciliation du 4ème art avec le public. Un bon point ira également à l'interprétation des comédiens qui se sont surpassés, donnant ainsi plus de sincérité à l'œuvre. Seul bémol, la scénographie réduite que le metteur en scène a essayé de compenser avec des projections en arrière-plan. W. S.