De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani à Annaba, il ne se passe pas de jour sans qu'il y ait un sit-in, une manifestation ou un rassemblement. Le lieu de prédilection est, bien sûr, le siège de la wilaya, symbole du pouvoir local, le seul pour les manifestants à même de régler leurs problèmes. Hier, près d'une centaine de citoyens habitant le quartier populaire «Djabanet Lihoud» se sont donné rendez-vous devant cette institution pour exiger d'être portés sur la liste des bénéficiaires de logements rendue publique récemment. Banderoles, panneaux et pancartes en mains, ils criaient leur colère devant près d'une trentaine d'agents de la police d'intervention déployés pour la circonstance. 3 jeunes, torse nu, se sont tailladé la poitrine à l'aide de couteaux tout en déversant des insultes et des insanités à l'adresse des autorités et des policiers. Deux d'entre eux sont montés sur le mur d'enceinte du centre de santé à quelques mètres du siège de la wilaya et ont commencé à invectiver tous ceux qui avaient le malheur d'emprunter la rue à tel point que cette voie de communication s'est très vite vidée. Puis, cette même voie a été barrée et fermée à la circulation par une vingtaine de manifestants qui s'étaient opposés au passage de tout véhicule. Ainsi, un chauffeur de taxi a été pris à partie par des jeunes contestataires qui l'ont attaqué, donnant de grands coups sur le capot du véhicule. Il n'a dû son salut qu'à l'intervention d'autres manifestants plus âgés qui lui ont conseillé de rebrousser chemin et d'emprunter une autre rue. Ce qu'il a fait. Mais, déjà derrière lui, une file de voitures s'était formée et il a fallu que tout le monde fasse marche arrière pour débloquer la situation. Tout cela s'était passé sous l'œil impassible des policiers en faction qui, à aucun moment, ne sont intervenus pour disperser le rassemblement qui commençait à grossir. Boucliers, casques et matraques en main, ces derniers formaient un cordon infranchissable devant les principaux accès du siège de la wilaya dont les portes ont été fermées au public pour éviter tout débordement. Un autre accès, situé face à la direction de l'éducation, a été ouvert au public et les personnes admises sont contrôlées et filtrées. A l'origine, cette protesta a été fomentée par un groupe d'habitants du quartier auxquels on avait rapporté que sur la liste des bénéficiaires figure le nom d'un citoyen aisé connu à Annaba. Le bon vieux téléphone arabe ayant fait des siennes, l'information amplifiée et déformée, à laquelle on a rajouté d'autres, a très vite fait le tour de la ville si bien que les habitants attendaient avec impatience le début de semaine pour en découdre avec les autorités accusées de tous les maux. En vérité, le nom de la personne en question ne figure même pas mais les populations manipulées ne veulent rien entendre, le capital confiance ayant été depuis longtemps épuisé. Un des manifestants à qui on a posé la question sur l'existence sur la liste des bénéficiaires de ce personnage, nous a répondu qu'il n'a pas vu lui-même la liste mais, du moment que tous le disent, il y croit et est prêt à aller avec eux partout. Comme quoi, il suffit d'alimenter la rue par une rumeur malveillante pour fomenter un mouvement de protestation qui peut facilement tourner à l'émeute si d'aventure la police intervenait.