Photo : Riad De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Avec ses douze communes, la wilaya de Constantine nécessite des moyens conséquents pour assurer une sécurité totale à tous les consommateurs. La tâche de l'administration s'en trouverait facilitée s'il y avait aux côtés des brigades de contrôle des associations qui se chargeraient de sensibiliser les citoyens et d'alerter les responsables des risques et infractions relevés sur le terrain. Mais il n'en est rien. L'administration n'a pas les moyens requis et le mouvement associatif est tout simplement absent, démissionnaire. Evidemment, cette situation ne peut que profiter à l'informel et à tous les commerçants dont le seul souci est de faire de gros bénéfices et qui ne se préoccupent nullement de l'hygiène encore moins de la santé des consommateurs auxquels ils font courir des risques d'intoxication et d'empoisonnement.Il suffit de faire un tour dans les marchés et les commerces pour constater l'absence totale de ces associations de défense des consommateurs. Pourtant, Constantine a réellement besoin de ces associations pour sensibiliser davantage les citoyens, surtout que les commerces ne cessent de proliférer. «Nous demeurons partisans de la promotion de ce genre d'associations en particulier et du mouvement associatif en général. Nous encourageons la création et l'engagement de ces associations dans cette mission qui est la défense des consommateurs et la prévention des risques d'intoxications alimentaires», nous confie un cadre à la Direction de wilaya du commerce. «Malheureusement, les bénévoles ne se bousculent pas au portillon», déplorera-t-il. De la nécessité d'une démarche globale Que ce soit en raison du manque de volonté ou à cause de toutes ces barrières administratives et bureaucratiques, l'absence des associations de défense des consommateurs laisse un grand vide dans le domaine de la protection des citoyens. Sur les quatre qui activaient il y a quelques années, la ville des Ponts n'en garde qu'une seule dont le champ d'action ne peut qu'être restreint. «L'encouragement de ce type d'action requiert une entreprise globale des pouvoirs publics et de tous les acteurs. L'antenne de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), la Direction de wilaya du commerce, du contrôle des prix et de la qualité et de la répression des fraudes (DCP) ainsi que les autorités locales ont le devoir de garantir la sécurité des bénévoles et de les assister afin qu'ils ne subissent pas de contraintes durant leur travail de sensibilisation et de dénonciation des pratiques délictueuses de l'activité commerciale», indique notre interlocuteur.Car, les commerçants, surtout ceux activant dans le marché parallèle, voient d'un mauvais œil ces «contrôleurs» bénévoles qui veulent les empêcher de se faire de l'argent. Certains n'hésitent pas à user de violence. Déjà que les contrôleurs officiels sont souvent agressés, que dire alors de simples bénévoles ? Le chef-lieu de wilaya et ses communes ont besoin d'une large contribution en matière de sensibilisation des consommateurs. Cela passera inévitablement par la constitution d'un tissu associatif important. La wilaya de Constantine reste malheureusement pauvre dans le domaine. Avec une seule association, qui ne peut être partout, il est tout simplement impossible de prétendre mener des actions de sensibilisation et/ou de lutte contre les infractions commerciales.Active depuis 1996, cette association joue le rôle d'agent d'alerte auprès de l'administration et de sensibilisateur auprès des consommateurs. Malgré le peu de moyens dont elle dispose, elle s'efforce tout de même de relever les infractions dans les différents espaces de commercialisation de tout type de produits et les transmet aux services de la Direction de wilaya du commerce. «Notre action est fortement entravée par le commerce informel», regrette la présidente de cette unique association en matière de défense des consommateurs, Mme Sakina Kellil. Quand les autorités locales s'impliquent En chasseuse aguerrie des irrégularités dans les ventes des produits de consommation, elle ne cesse de sillonner les différents marchés de la wilaya pour veiller au respect de l'hygiène dans les espaces de vente (étalages en plein air ou dans les échoppes). La dernière inspection l'a menée dans la commune d'Aïn Smara où elle s'est enquise de l'état du marché. Et Mme Kellil n'en est pas revenue les mains vides ! Elle a relevé une anomalie dans la vente des viandes blanches. «Malgré son interdiction formelle, cette pratique continue de sévir dans des souks. Des vendeurs égorgent les poulets dans des lieux inappropriés et les proposent directement à la vente sans l'avis d'un vétérinaire. La réglementation est pourtant claire à cet effet», indiquera-t-elle.A quelques semaines de l'ouverture de la saison estivale, l'association a tracé un programme d'actions qui sera ouvert avec le lancement d'une campagne de sensibilisation au niveau de la même municipalité sous le slogan «Eté sans risque à Aïn Smara», en collaboration avec le bureau d'hygiène de cette localité. «Pour cela, nous avons eu récemment l'appui du wali qui nous encourage à promouvoir notre action de sensibilisation», dira la présidente de l'association. Les autorités locales ne se contentent pas d'encourager, mais comptent également s'impliquer concrètement. Des secteurs d'intervention tels la DCP, la gendarmerie, la Sûreté de wilaya et les laboratoires de contrôle seront aux côtés de l'association qui refuse toujours les subventions, bien qu'elle y ait droit, préférant des soutiens plus tangibles, et donc plus productifs. L'appui du wali est déjà un acquis qui va lui permettre d'activer sans contraintes sur le terrain et ses observations auront aussi plus de chance d'être prises en compte par les parties intervenantes et d'avoir donc des effets. Car, il faut dire que le travail ardu de ce type d'association bute sur des difficultés, mais aussi sur des blocages dus à des complicités que les commerçants ont au sein de l'administration. De gros intérêts sont souvent en jeu et ceux qui en profitent font tout pour saborder toute action qui risquerait de les contrecarrer. La Direction du commerce sur le terrain Parallèlement à ces actions menées sur le terrain et dont les effets commencent à se faire sentir chez les consommateurs, la Direction du commerce poursuit de son côté son programme d'actions à travers des journées de sensibilisation destinées aux établissements scolaires (collèges et lycées) et les centres de formation professionnelle. «La tenue de ces journées vise à inculquer les bonnes pratiques et une culture de consommation saine», souligne M. Deni, chargé de la communication à la Direction du commerce. «Des explications sur les démarches à suivre dans l'approvisionnement sont fournies sur des supports informatique à l'ensemble du personnel dont les cuisiniers et les économes», expliquera-t-il. Vingt et un centres de formation professionnelle et douze établissements scolaires situés dans le chef-lieu de wilaya, au Khroub et à Hamma Bouziane sont retenus pour cette opération de vulgarisation mise en place par la DCP. L'opération cible également les opérateurs économiques versés dans l'industrie alimentaire et agroalimentaire. Dans ce contexte, notre interlocuteur nous fera part de quatre sorties de vulgarisation effectuées par les équipes de la DCP. «Nous informons les producteurs sur les mises à jour élaborées dans chaque secteur d'activité. Nos sorties visent également à contrôler d'éventuelles anomalies dans la qualité de la production en prenant en compte les prélèvements précédents», ajoutera-t-il. Pour conforter la sensibilisation, la Direction du commerce compte 54 brigades de contrôle qui veillent à la bonne qualité des produits, que ce soit sur le plan de la traçabilité ou de la conservation et stockage. Mais la tâche n'est pas de tout repos compte tenu du nombre de commerçants recensés à travers la circonscription, soit plus de 45 000, auxquels s'ajoute une kyrielle impressionnante de vendeurs informels. D'où la nécessité de promouvoir l'action du mouvement associatif qui devra constituer un pivot incontournable dans la sensibilisation pour attirer l'attention des acteurs principaux sur les pratiques commerciales délictueuses et/ou douteuses.