Photo : Riad De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Les prix augmentent et tous les responsables de famille aux revenus moyens ont la peur au ventre. Les pouvoirs publics, qui mènent des inspections et des contrôles, n'arrivent pas à endiguer l'envolée des prix. Le manque de personnel et d'équipement obligent les brigades de contrôle à concentrer leurs efforts durant les dates coïncidant avec l'augmentation des prix (fêtes et Ramadhan). Aussi ont-elles besoin d'appuis supplémentaires pour étoffer leur plan d'action. Et quand on parle d'appui, on songe en premier lieu aux associations de défense des consommateurs.A Constantine, la culture d'une défense accrue des consommateurs est loin de répondre à la norme. Hormis une association présidée par une femme et qui active sur le terrain depuis 1996, les consommateurs n'ont personne pour les défendre. Une hirondelle ne fait pas le printemps. Même si cette association ne ménage aucun effort et se déploie partout où le consommateur risque de se faire avoir ou saigner. Ainsi, les organisations qui se consacrent à la protection des consommateurs ne se bousculent à la Direction du commerce à Constantine, ni sur leur champ habituel d'action, à savoir les espaces de vente des produits de large consommation. Au départ, elles étaient cinq associations qui veillaient un tant soit peu à la qualité et aux prix des produits sur le marché. Mais bien vite, leur présence sur le terrain se fera rare pour divers motifs, dont les problèmes d'organisation interne. «Ce travail exige une volonté, un bénévolat en plus d'une honnêteté exemplaire pour pouvoir l'accomplir judicieusement», soutient Mme Sakina Kellil, présidente de l'unique association de protection des consommateurs à l'échelle de la circonscription. Etant donné sa formation universitaire (elle est contrôleur de qualité de produits alimentaires), la présidente est outillée pour mener sa bataille contre les contrefacteurs et les commerçants indélicats. Et quelle bataille ! Car braver des personnes qui ne pensent qu'à accumuler de l'argent et les dénoncer à la tutelle locale en cas de pratique frauduleuse dans les prix vous exposent à des risques certains. «Le rôle de l'association se limite à la sensibilisation. Nous ne pouvons intervenir dans des prérogatives propres à la Direction du contrôle des prix et de la qualité (DCP)», explique notre interlocutrice. «Mais nous nous constituons en partie civile près les tribunaux», ajoutera-t-elle. On se réjouit de l'existence de cette association fort active qui, malgré les difficultés qu'elle éprouve sur le terrain, tente vaille que vaille de réguler le marché. Agissant à longueur d'année en différents endroits de la wilaya pour apporter, outre, son travail en matière de sensibilisation auprès des commerçants, ladite association sensibilise les citoyens aux aliments susceptibles de générer des désagréments au double plan de la santé et des finances. En arpentant les étals des commerces, les membres de cette association fournissent des comptes-rendus et alertent les responsables compétents pour qu'ils interviennent en cas de suspicion dans la qualité des produits proposés à la vente ou les prix appliqués.«L'association qui se charge de la protection des consommateurs détient toute latitude pour nous signaler d'éventuelles anomalies dans les pratiques commerciales, notamment en ce qui concerne les prix proposés», nous confie un chef de service auprès de la DCP. Pour sa part, Mme Kellil avise la DCP après chaque fraude constatée sur le terrain. «Que ce soit au marché de gros ou de détail, notre action est effective. La moindre flambée inhabituelle dans les prix est automatiquement communiquée aux gestionnaires officiels», nous dira-t-elle.Toutefois, il reste beaucoup à faire pour espérer un jour dire que Constantine est assez nantie en «défenseurs des consommateurs». En attendant cet acquis, des responsables de la DCP et du bureau local de l'Union générale des commerçants et artisans (UGCA) soutiennent que le citoyen devra renforcer son capital en «culture de consommateur intelligent». Mais cet éveil a besoin d'être suscité. Et c'est le rôle des associations, qui n'existent pas. Ainsi, l'association de Mme Kellil se retrouve seule sur la brèche, ce qui ne l'empêche pas de mener sans relâche des campagnes de sensibilisation et ce, depuis décembre 1996, date où elle a vu le jour. Actuellement, l'association se compose de neuf membres et est représentée dans la majorité des municipalités par des bénévoles qui s'affairent comme au chef-lieu à débusquer les irrégularités. «Nous récusons toute sorte de budget, fût-ce de fonctionnement, car, après tout, ce travail demande une implication et une conscience qui n'ont pas de prix. C'est ce que nous menons depuis des années. Le budget ne règle en rien, ne peut substituer ou intensifier le travail qui nous est assigné», précise Mme Kellil.