Les premières élections post-Ben Ali en Tunisie, initialement prévues fin juillet, sont reportées au 23 octobre. Ces élections cruciales, auront valeur de test décisif pour la transition démocratique dans ce pays récemment débarrassé du joug de la dictature. Le vote pour une Assemblée constituante, qui devrait doter le pays d'un pouvoir légitime, était prévu le 24 juillet. Mais la commission électorale avait demandé un report, contre l'avis initial du gouvernement et de certains partis. Un véritable débat sur la date du scrutin s'est alors enclenché sur fond d'instabilité politique. Le premier ministre Béji Caïd Essebsi a annoncé le report en demandant aux Tunisiens de «rompre définitivement avec toutes les formes de grèves et de protestations» pour pouvoir tenir les élections dans de bonnes conditions. Des négociations serrées s'étaient tenues ces dernières semaines avec les formations politiques tunisiennes pour parvenir à un consensus sur la date d'un scrutin crucial dans l'histoire du pays. Le mouvement islamiste Ennahda, crédité d'au moins 20% des intentions de vote par les observateurs, semble avoir finalement accepté ce report, après une longue tergiversation. Une autre grande formation politique tunisienne, le Parti démocratique progressiste (PDP), s'est également s'est dite favorable à l'avis de la commission électorale. La plupart des petits partis, créés dans la foulée de la chute du régime, se sont déclarés pour le report. L'unanimité l'emporte sur la nécessité de bien se préparer aux élections. L'Assemblée constituante sera chargée de rédiger une nouvelle Constitution en remplacement de celle de l'ancien régime. L'Assemblée déterminera elle-même la durée de son mandat. La situation de «vide politique» que vit la Tunisie a ouvert la voie à une «contre révolution» initiée par les rebuts de l'ancien système. La tenue le 23 octobre prochain des premières élections libres constituera également un défi logistique et technique. Le succès de ce scrutin est impératif pour faire entrer le pays dans une phase de stabilité. Sur le plan organisationnel c'est un test majeur pour la commission électorale qui aura comme mission de dresser la liste des Tunisiens en âge de voter. Les autorités doivent aussi inscrire millions d'électeurs supplémentaires sur les listes électorales. Sur plus de 10 millions de Tunisiens, au moins 500.000 citoyens en âge de voter seraient dépourvus de carte d'identité. Après un demi-siècle d'hégémonisme du parti unique sous Habib Bourguiba puis Ben Ali, la Tunisie devrait passer à une étape qualitative de sa vie politique. La dissolution de l'omnipotent Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) après la chute de Benali a constitué un point marquant dans la volonté de tourner la page avec l'ancien système. La Tunisie est passée en 2011 d'un système de parti-Etat au multipartisme. Le pays s'est retrouvé avec plus de 80 formations politiques, majoritairement inconnues du grand public. M. B.