Si pour des raisons évidentes – mais pas nécessairement justes – de mondialisation et de globalisation l'Algérien doit désormais passer par les autres pays pour avoir droit aux meilleurs produits économiques ou culturels, pourquoi diable demeure-t-il dépendant de ses voisins occidentaux ou arabes pour accéder aux créations des artistes de son propre pays ? Au nom de quelle logique doit-il guetter la télévision marocaine pour profiter d'un concert du chanteur Idir (depuis quand ne s'est-il pas produit en Algérie, celui-là ?), comme il a dû scruter Al Djazira lors du Mondial 2010 pour découvrir les réactions d'après-match des joueurs de son équipe nationale de football, avant même qu'elles ne soient diffusées par sa télévision nationale ?On le sait, la globalisation a fortement contribué à asseoir l'hégémonie du plus fort et sérieusement compliqué la tâche des pays du tiers-monde dans leur entreprise de développement. Mais cela n'explique pas tout dans cette spoliation du droit de profiter des «trésors nationaux». Voilà maintenant plus de 20 années que, par la faute de dirigeants allergiques à la chose artistique, l'Algérien est quasiment sevré de vie culturelle véritable et des créations que ses concitoyens artistes – poussés vers l'exil à un moment de leur vie – parviennent à accomplir pour le bonheur d'autres peuples. Chanteurs, peintres, écrivains et artistes à tous crins animent la vie culturelle de leur pays d'accueil par de nombreuses créations et productions auxquelles les Algériens n'accèdent généralement que de loin et, très souvent, à travers les médias étrangers. Pour avoir plus de chances d'assister à un concert de Khaled ou d'Idir, il vaut mieux se trouver en France et il suffit, pour s'en convaincre, de comparer le nombre de concerts que ces deux chanteurs ont animés à l'étranger et leurs apparitions en Algérie durant les deux décennies qui se sont écoulées.En l'absence d'une véritable stratégie culturelle adossée à une volonté politique réelle des pouvoirs publics de relance des Arts en Algérie, nos artistes continuent – et continueront sans doute pour longtemps encore – de travailler à l'étranger, et les jeunes talents qui animent plus ou moins la scène culturelle nationale risquent eux aussi d'emprunter le même chemin que leurs aînés Khaled, Boutela, Idir ou Mami ont dû prendre il y a deux décennies, pour aller là où ils peuvent accéder aux conditions leur permettant de s'épanouir et donner libre cours à leur génie créateur.En attendant la mise en place de cette stratégie qui permettrait aux créateurs de vivre dans la dignité, de créer en toute liberté ou, à tout le moins, leur garantirait les conditions minimum pour se produire dans les différentes villes du pays, les Algériens continueront de scruter les écrans de télévision et d'écumer le Web à la recherche de ces artistes par trop rares en Algérie. S. O. A.