Au moment où Bahreïn s'apprête à engager un dialogue national afin de relancer un processus de réformes, des décisions de justice pourraient attiser de nouveau la tension communautaire. Huit opposants chiites et leaders de la contestation contre la monarchie, ont été condamnés à la perpétuité par un tribunal spécial. Les personnes condamnées font partie de l'opposition radicale qui a ouvertement appelé pendant les révoltes de la mi-février à la mi-mars à l'instauration d'une république, et surtout au départ de la dynastie sunnite des Al-Khalifa. La main de la justice s'est avérée très lourde à l'encontre des contradicteurs. Pourtant le principal courant de l'opposition chiite incarné par le mouvement Wefaq s'était limité à appeler à une monarchie constitutionnelle dans laquelle le chef du gouvernement serait le leader de la majorité au Parlement. Le Wefaq avait aussi accepté dans une posture d'apaisement, de prendre part au dialogue prévu pour début juillet pour relancer le processus des réformes politiques qui avaient permis de rétablir le Parlement à Bahreïn en 2001. Pour protester contre la répression le Wefaq avait retiré ses 18 élus de cette chambre de 40 sièges. Une vingtaine d'opposants, dont sept en fuite, étaient jugés. Ils ont été reconnus coupables d'avoir «formé et dirigé un groupe terroriste visant à changer la Constitution et le régime monarchique». Ils ont été reconnus coupables «d'avoir été en contact avec un groupe terroriste à l'étranger, qui agit dans l'intérêt d'un pays étranger en procédant à des actes hostiles contre le royaume de Bahreïn.» Parmi les opposants condamnés à la perpétuité Hassan Mashaimaa, le chef du mouvement de l'opposition chiite Haq, Abdelwahab Hussein, chef du mouvement islamique chiite Wafa et le militant chiite des droits de l'Homme, Abdelhadi al-Khawaja, détenant la nationalité danoise. Un autre militant faisant partie de Haq, souffrant d'une paralysie des jambes, a également été condamné à la perpétuité. Le tribunal a également condamné 13 autres personnes à des peines, allant de deux à 15 ans de prison. L'un des rares sunnites du groupe, Ibrahim Chérif, chef du mouvement Waed, une formation de la gauche laïque, a écopé de cinq ans de prison. Une condamnation qui vise plus à dénier le caractère communautariste patent des peines. Le verdict a été précédé par plusieurs manifestations de protestation dans les villages chiites de Bahreïn. La justice bahreïnie juge depuis des semaines les personnes ayant participé à la contestation du régime en place. La vague de protestation populaire et sa répression ont fait entre février et mars dernier des dizaines de morts. Les autorités bahreinis ont écrasé la contestation et fait appel à des troupes d'une force commune du Conseil de coopération du Golfe (CCG). Des troupes saoudiennes ont été déployés à Bahreïn ce qui a été dénoncé notamment par l'Iran. M. B.