Une vague de trente-sept arrestations a été opérée parmi les militaires guinéens depuis l'attaque mardi contre le domicile du président Alpha Condé à Conakry à la suite de laquelle le gouvernement entend sensibiliser populations et militaires au souci d'éviter tout dérapage. Ces militaires sont essentiellement des proches de l'ex-président du régime de transition (2010), le général Sékouba Konaté, et de l'ex-chef de la junte militaire, Moussa Dadis Camara (fin 2008 à fin 2009), qui vit désormais en exil à Ouagadougou, selon une source militaire. Parmi eux figure un colonel très influent surnommé «De Gaulle», lié au général Konaté, ainsi qu'un commandant proche de l'ex-président Lansana Conté (1984-2008), Alpha Oumar Diallo, dit «AOB». Nouhou Thiam, ex-chef d'état-major des armées du temps du régime de transition et dont l'arrestation avait été annoncée mardi par son épouse, est toujours détenu. Limogé par le président Condé, il est considéré comme «suspect», selon la même source. La vie reprenait hier son cours normal à Conakry au lendemain de l'attaque, la plupart des barrages militaires érigés juste après ayant été levés. L'attaque, qualifiée de «tentative d'assassinat» par Alpha Condé qui en est sorti indemne, fermement condamnée par l'opposition guinéenne et la communauté internationale, a surpris dans ce pays qui venait de connaître la première élection présidentielle libre de son histoire. Elle représente le risque de voir à nouveau la violence exploser en Guinée, dont l'histoire est marquée par les dictatures, civiles ou militaires, les coups d'Etat et les tensions entre ethnies qui traversent tous les secteurs de la société, partis politiques et forces armées comprises. Quelques heures après l'attaque (un garde présidentiel tué, deux blessés), Alpha Condé a appelé ses compatriotes «au calme» et à la «vigilance», leur demandant de ne surtout pas réagir «contre qui que ce soit». Le Premier ministre Mohamed Saïd Fofana, qui a réuni en urgence mardi les responsables des plus hautes instances de l'Etat et de l'armée, leur a demandé «de sensibiliser», chacun dans son secteur, «pour éviter des dérives incontrôlables». La France, ex-puissance coloniale en Guinée, n'a pas caché que l'organisation rapide des législatives serait un gage d'apaisement. Ce scrutin aurait théoriquement dû être organisé dans les six mois suivant l'investiture d'Alpha Condé en décembre 2010, mais le nouveau président a souhaité faire un recensement en vue d'établir un nouveau fichier électoral pour corriger les anomalies apparues lors du scrutin présidentiel. Une aberration, selon ses opposants qui soulignent que le dernier recensement date de 2009 et reste celui grâce auquel Condé a été élu. R. I.