Ces hommes en bleu, qui, hier et aujourd'hui encore, ont consenti d'énormes sacrifices dans la lutte contre les groupes armés, se sentaient dans la peau de laissés pour compte du système, car ne bénéficiant d'aucun des avantage accordés aux autres services de sécurité (police, gendarmerie). Las aussi d'attendre un statut reconnaissant «leur sacrifice à la nation» qui tardait à venir, ils ont décidé de porter devant l'opinion publique leurs revendications portées par un vent libertaire qui soufflait sur le pays. Les éléments de ce corps des auxiliaires réclament notamment une «retraite complète pour les promotions des années 1994 à 1997 sans limitation d'âge, une augmentation des salaires de 10 000 DA au minimum, le paiement des heures supplémentaires, l'octroi d'une prime compensatoire des 17 ans de lutte antiterroriste accomplis et la réintégration des éléments radiés après indemnisation des années perdues». Cela n'a pas été de tout repos pour les gardes communaux, qui n'avaient que leur ténacité à faire valoir devant le refus obstiné de l'administration de ne reconnaître qu'une partie de leurs revendications, surtout lorsqu'un groupe composé d'une quinzaine de jeunes s'en est pris violemment à eux, en faisant neuf blessés. Dès le début de la protestation, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, M. Daho Ould Kablia, a affirmé qu'il prendra en charge les revendications des gardes communaux «admissibles» pour lesquels il dira essayer de «leur donner le maximum de ce qui est rationnel et logique». Il a affirmé qu'il prendra en charge 8 des 14 points de la plate-forme de revendications des gardes communaux, notamment l'augmentation des salaires et des primes, le paiement des congés ainsi que les heures supplémentaires. Mais, à côté, il y avait d'autres points «insensés» relatifs à certaines indemnités. Pour étudier la question, une commission a été installée. Elle était composée de membres du ministère de l'Intérieur, la Fonction publique, la Gendarmerie et la Sûreté nationales et des délégués des gardes communaux, pour traiter de leurs revendications. Les promesses de la tutelle ont été diversement appréciées par les gardes communaux. Les centaines de gardes communaux venus des différentes wilayas du pays, qui ont pu échapper aux mailles des filtres des services de sécurité pour les empêcher d'atteindre la capitale, se déclaraient en sit-in ouvert jusqu'à satisfaction de leurs revendications socioprofessionnelles. Ils ont, par ailleurs, exprimé leur refus de la décision du ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales concernant leur redéploiement, appelant à l'officialisation du corps et à la promulgation de son statut. Ils se disent non convaincus des mesures prises par cette commission, à savoir le départ en retraite, les primes, les logements et l'intégration du corps des gardes communaux. A ces «efforts» les pouvoirs publics n'ont eu pour seule réponse de la part des protestataires, qui ont promis de durcir davantage leur mouvement, qu'une condition sine qua non, devant se matérialiser par un «statut et une reconnaissance». Les milliers d'agents ont répliqué par une tentative de tenir un sit-in devant le siège de la présidence, mais ont fini par y être empêchés. Et ce, avant de rejoindre la place des Martyrs, à Alger, pour y tenir un «sit-in ouvert». La persévérance de ce corps, fort de près de 100 000 hommes, a fini par payer. Puisqu'une partie (environ les trois quarts des effectifs) des gardes communaux va intégrer l'Armée nationale populaire (ANP) avec le statut de paramilitaire et aura pour charge la lutte antiterroriste, conformément aux recommandations de la commission mise en place au niveau du MDN. Sur un total de 94 000 gardes communaux, 70 000 éléments intégreront l'ANP, 25 000 autres seront reconvertis comme agents de police communale et le reste, souffrant de maladies chroniques ou d'un handicap, sera, selon le cas, soit mis en retraite soit indemnisé. Pour le reste, les gardes communaux ont finalement obtenu que les autorités acceptent l'ensemble de leurs revendications. Leur combat n'aura pas été vain. A. R.