Photo : Riad Par Ali Boukhlef Abdelaziz Belkhadem n'a pas dérogé à ses habitudes. A quelques jours de la tenue d'une session extraordinaire et à haut risque du Comité central de son parti, le chef du FLN savoure ses derniers jours de vacances à la plage Marsa Ben M'hidi, à l'extrême Ouest du pays, avant d'affronter une nouvelle tempête qui guette son parti. Avant cette énième rencontre extraordinaire, qui se tiendra samedi et dimanche à l'hôtel Riadh de Sidi-Fredj, Abdelaziz Belkhadem présidera vendredi soir une réunion décisive du bureau politique. C'est la première fois depuis le dernier Congrès d'avril 2010 qu'une session extraordinaire du Comité central se tient et de manière presque accélérée. Puisque la dernière session s'était tenue il y a moins de deux mois. C'est le signe d'une situation devenue insupportable pour les dirigeants d'un parti qui n'a pas connu de répit depuis au moins 7 mois. Le menu de cette rencontre de samedi est des plus ordinaires, selon le contenu du communiqué qui a sanctionné la dernière réunion du bureau politique qui s'est tenue le 11 juillet dernier. Il s'agit entre autres de préparer les échéances électorales et de discuter «des questions organiques». Une expression répétée mot à mot par Kassa Aïssi, chargé de communication du parti, qui tient la permanence lors des vacances.La session extraordinaire du Comité central du FLN se présente sous de mauvais auspices. A une semaine de cette échéance, les luttes intestines entre les militants s'aiguisent. Par le truchement de déclarations incendiaires ou de vrais coups de couteau, la guerre des nerfs s'accentue chaque jour davantage entre «légalistes» et «redresseurs», même si les partisans de Abdelaziz Belkhadem ont un atout important : ils gardent toujours la majorité des membres du Comité central.«Ils sont 17 à ne pas venir à la dernière session du Comité central», s'est évertué à répondre Kassa Aïssi, lorsque la question de la dissidence s'est posée. Pour lui, comme pour beaucoup de responsables restés fidèles à la ligne de l'actuel secrétaire général, la question de la légitimité ne se pose pas. Mais c'est bien la lancinante problématique de la légalité qu'il faut mettre en avant. «Celui qui a des problèmes n'a qu'à venir les exposer au Comité central», a répondu le responsable du FLN. Notre interlocuteur pense que même les problèmes soulevés lors du renouvellement des instances de base ne sont pas à dramatiser. «Ce sont des choses normales», dit-il. Il y a eu pourtant des blessés graves dans beaucoup de mouhafadhates. De l'autre côté, le discours est plutôt offensif. Même minoritaires actuellement au sein des instances officielles du parti, les redresseurs veulent aller jusqu'au bout. Réunis autour d'un vieux connaisseur de la maison FLN, Salah Goudjil en l'occurrence, les «redresseurs» croient en la légitimité de leur action. Ironie de l'histoire, Abdelaziz Belkhadem lui-même était à la tête d'un mouvement de redressement il y a 8 ans, même si aujourd'hui il se défend d'être «fractionnaire». Il pense qu'il luttait plutôt «pour des idées et non pour des places».Le mouvement de redressement se structure en parallèle. La semaine dernière, des délégués des wilayas du centre s'étaient réunis à Alger pour structurer la base. A défaut de s'accaparer des structures légales, une villa louée à Draria, sur les hauteurs de la capitale, sert de siège à l'équipe dirigée par Salah Goudjil. Si la rencontre d'Alger s'était plutôt bien passée, il en était autrement du côté de l'Est et de l'Ouest.Il y a une vingtaine de jours, une rencontre des redresseurs de l'Ouest, tenue à El Bayadh sous la direction de Abdelkrim Abada, avait tourné au vinaigre. Une bagarre avait opposé les partisans du redressement à ceux de la ligne «légale» de l'ancien parti unique. Ces escarmouches n'étaient pourtant pas aussi violentes et sanglantes que celles qui ont eu lieu une semaine plus tard à Tébessa. Les «redresseurs» de l'antique Théveste s'étaient réunis dans le siège même du parti. C'est une première. Puisque depuis le début de ce mouvement en janvier dernier, les rencontres se tiennent plutôt dans des endroits privés ou dans les domiciles de certains militants. A Tébessa, Mohamed-Seghir Kara, responsable de la communication du mouvement, estime que l'équipe nommée par Belkhadem a été «délogée». On estime du côté de Draria que ces responsables «n'ont jamais été militants du FLN». Pis, on spécule sur les réelles motivations de Abdelaziz Belkhadem en nommant un député, élu sur une liste concurrente au parti, comme responsable local. «C'est eux qui disent cela», réplique Kassa Aïssi, qui pense que «certains militants ont quitté le parti avant de rejoindre les rangs». Toujours est-il que cette rencontre des «redresseurs» de l'Est a provoqué l'inimaginable : plusieurs personnes ont été gravement blessées. Et, pour la première fois, la police est intervenue dans une affaire partisane en ouvrant une enquête.D'autres signes de divisions se profilent. Pour la première fois depuis le dernier congrès, Salah Goudjil a brandi, la semaine dernière, la menace de constituer des listes parallèles lors des prochaines élections locales et législatives si les deux parties ne parviennent pas à un accord. L'ancien ministre est allé même jusqu'à insinuer la possibilité de listes indépendantes, en dehors du sigle FLN «pour respecter la réglementation». Mais comme Belkhadem, Goudjil ne ferme toujours pas les portes du dialogue. «Nous tenons toujours au dialogue comme meilleur moyen de régler les problèmes», avait-il dit à des journalistes. Dialoguer avec qui ? Salah Goudjil répond que les concertations se font uniquement entre lui et l'actuel secrétaire général.C'est donc dans un climat des plus tendus que se tiendra la session extraordinaire du Comité central du FLN. Sera-t-elle la session de l'exclusion des réfractaires ou plutôt celle de la réconciliation ?