Photo : S. Zoheir Par Hassan Gherab L'ennui est un bon réactif pour l'imagination, soutiennent de nombreux spécialistes. Quand on n'a rien à faire, nulle part où aller et qu'on a, en plus, le ventre vide, le temps se fige et les heures marquent le pas. Dès lors, tout est bon pour faire passer la journée. Il y a bien la tournée du marché, mais elle n'a lieu que juste avant la rupture du jeûne. Or, c'est le temps qui nous sépare de ce moment qu'on a besoin de meubler. Pour ce faire, il n'y a rien de tel que les occupations distractives. Qu'y a-t-il de mieux qu'un livre sympathique, de la belle musique ou un bon film pour passer d'agréables moments ?La question n'appelle pas de réponse. Mais ce n'est pas pour autant que le recours à ces «passe-temps» culturels soit généralisé, socialisé. Que de nombreux libraires pensent à prendre leur congé durant le mois de ramadhan montre bien ce que sont les ventes de livres durant le mois de carême. «En été, généralement, les ventes baissent spectaculairement, notamment au mois d'août et avec l'arrivée du mois sacré, elles sont quasi nulles car peu de personnes bouquinent en cette période», expliquera un libraire de Constantine qui passe ses journées de ramadhan à agencer et réorganiser ses rayons, faute de lecteurs. Le cinéma n'a pas la cote non plus, ce qui ne veut pas dire que les films ne tournent pas. Bien au contraire, les CD de musique et DVD et Dvix de films piratés se vendent comme des petits pains durant ce mois. Les petits vendeurs sur les places de marchés et dans les rues commerçantes enregistrent des chiffres de vente que beaucoup de commerçants leur envieraient.En fait, on ne consomme pas des arts mais de la culture fast-food qui comble les sens et le besoin de s'évader sans solliciter l'esprit. Mais rien n'est fait pour qu'il en soit autrement. Toutes les institutions en charge de l'animation artistique ne pensent qu'aux soirées de ramadhan, c'est d'ailleurs la seule période durant laquelle le citoyen a un petit choix d'activités. Aucun des gérants des quelques cinémas encore opérationnels ne pense à adopter un pass spécial ramadhan qui accorderait l'accès à toutes les séances durant le mois, aucun libraire ne fait le petit effort de consentir des remises à l'occasion de ramadhan… Tout est fait pour que la véritable culture, les arts authentiques tournent le dos à la société. Et, livrés à leur sort, les jeunes trouvent leur bonheur dans les cybercafés -quand ils n'ont pas l'Internent à domicile-, pour jouer, écouter de la musique, voir des films, se faire des ami(e)s, faire leurs devoirs… bref, vivre. Sommes-nous donc condamnés à ne plus voir et vivre notre vie qu'à travers un petit écran et des images virtuelles ?