Le président syrien est-il conscient de la sombre perspective qu'il offre à son pays en misant encore sur la répression ? Ce qui se passe ces derniers jours en Libye devrait l'inciter à faire éviter à son pays un scénario de chaos. Il semble cependant que l'ophtalmologue Bachar al-Assad est atteint de strabisme politique puisqu'il donne la confirmation de ne rien voir en Libye. Il s'agit pourtant d'un événement - la chute de Kadhafi - dont il a intérêt à tirer les enseignements qui s'imposent. Et réfléchir à traiter les Syriens de façon différente que celle en vigueur depuis son accession au pouvoir en remplacement de son père Hafedh. Il semble, cependant, qu'il y a une autre constante chez les régimes arabes. Celle qui fait dire à chacun des dirigeants de ces contrées que cela n'arrive qu'aux autres. Or, les événements vécus ces derniers mois dans le monde arabe prouvent clairement que la sentence de l'Histoire a toujours été sévère. Hosni Moubarak, l'ancien président d'Egypte, ne s'est jamais imaginé une telle chute. La fin tragique de la famille Moubarak, en Egypte, ainsi que celle de la doublette Ben Ali-Trabelsi, en Tunisie, devrait donner matière à réfléchir à tous les tyrans. Kadhafi vient de se faire chasser d'un pouvoir qu'il a exercé pendant plus de quatre décennies. Il croyait avoir la puissance et les soutiens nécessaires pour s'éterniser au pouvoir avant de disparaître complètement dans le paysage national. La chute du Guide libyen invite ainsi le président syrien à comprendre que tout pouvoir ne reposant pas sur la légitimité populaire est condamné à partir. Ces régimes ont beau misé sur des appareils de répression et de contrôle de la société. Ils finissent souvent par faire un consensus auprès de la société contre leur maintien aux commandes. Trois tyrans déchus, depuis janvier 2011, cela devrait inciter les dirigeants des pays arabes à revoir leur copie. Et surtout offrir de meilleures perspectives à leurs pays que celles d'une guerre civile ou d'une fragmentation. Mais un tel exercice de raison ne peut pas être accompli par une personne du profil d'al-Assad aveuglé par le pouvoir. C'est cette folie de pouvoir qui empêche al-Assad de songer à traiter les Syriens comme des hommes libres et capables de s'organiser. En procédant, dans la journée d'hier, à l'arrestation de 150 personnes près de Damas, le régime d'al-Assad donne la preuve de son indifférence à ce qui se passe autour de lui. C'est le contraire de ce que pensent les Syriens qui activent pour que leur pays ne connaisse pas un scénario à la libyenne. La volonté des citoyens syriens d'«empêcher toute intervention étrangère et maintenir l'unité du peuple», est loin d'être partagée par les tenants du régime qui refusent de retenir les leçons du cas libyen. A. Y.