De tous les pays du Maghreb, le Maroc constitue une exception. Ne serait-ce que parce que c'est la seule monarchie de la région, le pays de Mohamed VI est atypique.La position du Roi qui est «Amir El Mouaminine» (Commandeur des croyants) n'a pas empêché les Marocains de sortir dans la rue. Dans le sillage des révolutions arabes, des jeunes Marocains, réunis dans le mouvement dit du 20 février, ont organisé à plusieurs reprises des manifestations dans plusieurs régions. A Casablanca, Rabat ou dans d'autres localités, ces manifestants réclament avant tout «une monarchie constitutionnelle». Autrement dit, réduire le Roi à un rôle beaucoup plus protocolaire, comme c'est le cas dans les monarchies européennes, à l'image de l'Espagne, la Suède, la Norvège, où le souverain joue un rôle beaucoup plus honorifique.Devant la radicalisation du mouvement, le Roi Mohammed VI a tenté de colmater les brèches. Il a non seulement immédiatement réagi, mais il a surtout bien manœuvré : il a promis et organisé un référendum constitutionnel en juillet dernier. Pendant que le souverain marocain faisait ses promesses, des jeunes se sont fait tuer dans les rues de Rabat. N'empêche, les «réformes royales» sont en marche.Mohamed VI ne fait pas de grosses concessions. Dans son discours de juin dernier, où il annonçait la révision de la constitution, le souverain alaouite délègue certains pouvoirs au chef du gouvernement. Ce dernier, qui sera désormais issu du parti majoritaire au Parlement, n'aura pas de pouvoir sur l'armée et ne sera pas le chef de l'Exécutif. Ces attributions en plus de celle de Commandeur des croyants restent jalousement l'apanage du Roi. Pour mieux faire passer la pilule, ce dernier a fait un autre geste symbolique : tamazight est désormais langue nationale et officielle. Cette décision n'est pas étrangère à l'émergence, depuis plusieurs années déjà, d'un mouvement berbériste de plus en plus offensif. Le référendum du 1er juillet dernier a définitivement «consacré» les réformes du Roi. Le «oui» l'a emporté avec 94% des voix sur les 72% des votants. Les résultats sont «brejnéviens». Mais le régime marocain croit à un plébiscite. Il se met en marche et propose, dans la foulée, des élections législatives pour le 25 novembre prochain. Le premier ministre, Abbas El Fassi, considère que des élections législatives anticipées sont nécessaires en vue de la nouvelle donne politique. Elles devront se dérouler normalement en septembre 2012. Cette annonce vise ostensiblement à calmer l'opposition qui réclame plus de démocratie et de transparence dans la gestion de l'Etat. Les jeunes du «20 février» n'ont pas cessé leur mouvement, pour autant. Ils continuent à réclamer plus de démocratie et plus de transparence dans la gestion des deniers publics. Certains mouvements politiques, minoritaires jusque-là, demandent même la suppression de la monarchie. Cela est une autre histoire. A. B.