De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani L'anarchie qui caractérise le marché hebdomadaire de voitures de Annaba est à l'image de la ville où le désordre ambiant a «glissé» dans la normalité et a été intégré bon gré mal gré par tous, l'absence de réaction des autorités étant le socle de cette situation insolite. Ce marché continue à se tenir chaque vendredi juste devant le complexe sportif 19-Mai 1956, sur le grand parking réservé aux visiteurs. On y vient de partout pour vendre et acheter toutes sortes d'objets, voitures, accessoires, pièces détachées, outils, pneus, vêtements, chaussures, fripes et autres produits ; le tout baigne bien sûr dans l'informel avec la bénédiction de tous. L'origine de la marchandise ? On n'en sait absolument rien, et d'ailleurs la question est taboue et personne n'ose la poser ; on se contente de marchander pour acquérir tel ou tel accessoire qui peut avoir été démonté de quelque voiture en stationnement. D'ailleurs, ce type de vol ne se compte plus. Il est fort possible qu'on achète dans ce marché ce qui vous a été volé récemment, surtout s'il ne porte pas de signe distinctif. Le reste des produits exposés, particulièrement les pièces détachées, sont contrefaits, plaquettes de frein, filtres de toutes sortes ou bougies ressemblent parfaitement à ceux d'origine, mais ces pièces s'usent au bout de quelques jours et risquent d'être à l'origine d'accidents mortels. Les voitures d'occasion vendues peuvent être trafiquées ou comportent des vices cachés, ce qui cause bien des désagréments aux acquéreurs quelque temps plus tard. Les vols à la tire, les agressions et les arnaques sont légion, bref un véritable coupe-gorge ce marché où il faut être constamment sur ses gardes et être accompagné pour ne pas être détroussé.Le stationnement des voitures des visiteurs venant des localités voisines et même des wilayas proches pose problème du fait qu'il n'y a pas de parking affecté aux véhicules. Alors, on se gare n'importe où et n'importe comment ajoutant encore plus à l'anarchie ambiante. La RN 44, une voie censée être rapide et qui longe ce marché, est encombrée sur les 2 côtés et les automobilistes de passage sont obligés de ralentir. Des bouchons se forment des 2 côtés, la circulation s'en trouve ralentie et parfois même bloquée jusqu'à l'arrivée de la police de la route. «Les parkings» improvisés sont tenus par des jeunes armés de gourdins qui rançonnent les automobilistes ; même pour un quart d'heure de stationnement, il faut payer entre 50 et 100 DA selon les chefs autoproclamés de ces parkings sauvages. La police qui fait des rondes intervient rarement surtout lorsqu'il y a bagarre entre personnes, autrement elle laisse faire et ferme les yeux sur ces rançonneurs qui continuent leur racket. L'encombrement et les stationnements dangereux ont provoqué plusieurs accidents causant principalement des dégâts matériels. Des altercations éclatent entre automobilistes et parfois on en vient aux mains pour régler le différend né suite à l'accident survenu.Ce qui est sûr, c'est que dans ce marché aucune forme de contrôle n'est exercée par les agents de l'Etat et des milliards sont brassés chaque vendredi sans que le fisc ne touche un centime de ces transactions.